Mon assiette contient-elle des pesticides ou des OGM? Y a-t-il du porc dans mon yogourt? Le CD-Rom qui sort cette semaine en Suisse vous aide à répondre à toutes ces questions.
La relation de l’homme à ses aliments est devenue des plus inconfortable. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder «J’ai décidé de maigrir», le nouveau feuilleton de M6, emblématique d’un véritable paradoxe de la prospérité. «De la sécurité alimentaire aux risques d’obésité, l’alimentation n’a jamais posé autant de problèmes aux omnivores que nous sommes, dans une société où règne pourtant l’abondance de nourriture», observe Claude Fischler dans «L’homnivore» (paru aux éditions Odile Jacob).
Mon assiette contient-elle des pesticides ou des OGM? Combien de calories dans cette pâtisserie? Y a-t-il du porc dans mon yogourt? Jusqu’ici, il était plus difficle de répondre à ces questions en Suisse que dans les pays voisins. La Suisse était en effet l’un des derniers pays européens à ne pas disposer de sa propre banque de données sur la composition des aliments.
Cette lacune sera comblée dès cette semaine avec la mise à disposition du public d’une «Banque de données suisse des valeurs nutritives», éditée sur CD-Rom.
Chaque année, les Suisses ingurgitent 740 kilos de nourriture. Les deux tiers proviennent de produits étrangers. Restait donc un quart de tonne d’aliments indigènes au sujet desquels les informations étaient souvent bien lacunaires. Qu’en est-il de la composition du Rivella, de l’Ovomaltine, du saucisson vaudois, du cervelas ou du sbrinz qui ne figurent pas sur les tables internationales?
Les réponses se trouvent sur le CD-Rom, qui contient les données de 700 aliments couvrant 90% du marché suisse ainsi que de 36 constituants. L’Association suisse pour l’alimentation (ASA) est chargée de sa diffusion au prix de 80 francs pour les particuliers, 20 francs pour les écoles et 320 francs pour les entreprises. Une version imprimée sortira à la fin de l’année.
Connaître la composition exacte des aliments est essentiel pour l’approche diététique de maladies corrélées à l’alimentation ainsi que pour l’étiquetage des produits alimentaires. Les personnes soumises à une diète particulière, pour cause d’allergies par exemple, les obèses, les femmes souffrant d’ostéoporose et les diabétiques seront les principaux bénéficiaires de ce CD-Rom.
Il est question de développer également, comme c’est déjà le cas dans les pays voisins, un site. Son financement dépend du succès de la motion du parlementaire Felix Gutzwiller déposée devant le Conseil national en mars dernier et intitulée «Alimentation. Encouragement de l’information, de l’éducation et de la formation».
A elle seule, la lecture de la presse de ce mois de janvier devrait convaincre les parlementaires du désarroi ambiant et de l’ampleur de la tâche éducative à mener. Dans le Sonntagszeitung, un article laisse entendre que nous devrions engager un «Weight Coach» personnel pour naviguer correctement dans le flot des tentations malsaines.
En Grande-Bretagne, on prépare une législation obligeant les restaurants à afficher le nombre de calories contenues dans leurs mets. «Aurions-nous échappé au scorbut, à la pellagre et au rachitisme pour souffrir d’une forme de malnutrition liée au high-tech?», s’interroge Geoffrey Cowley dans Newsweek, qui vient de consacrer un dossier très complet à «la diète parfaite».
C’est du jamais vu: aux Etats-Unis, des patrons de l’industrie alimentaire ne viennent-ils pas d’en appeler à la responsabilité du consommateur? «N’emmenez pas vos enfants plus d’une fois par semaine chez McDo», recommande le géant du hamburger. Et le président de PepsiCola de l’imiter: «N’abusez pas de nos sodas et de nos chips». L’avertissement «Nuit à la santé» figurera peut-être un jour sur les emballages des fast-foods…
L’Amérique n’a évidemment pas le monopole de la «malbouffe». L’actuel combat de Jacques Chirac contre le cancer révèle qu’en France, le poids respectif des facteurs de risque sur la mortalité par cancer est estimé à hauteur de 10% pour l’alcool, 30 % pour le tabagisme et 35% pour le régime alimentaire, indiquait Le Monde dans son édition du 17 janvier. «On creuse sa tombe avec ses dents», prétend un vieux dicton aujourd’hui réactualisé.
