KAPITAL

Plans de mobilité: exemples à suivre

Qu’il s’agisse d’optimiser leurs infrastructures de stationnement ou de s’engager pour la protection de l’environnement, bon nombre d’entreprises élaborent aujourd’hui des plans de mobilité internes.

Une coalition de 85 organisations a déposé il a y deux ans l’initiative dite «des entreprises responsables», visant à instaurer des mesures contraignantes en matière de droits de l’homme et de l’environnement pour les sociétés actives en Suisse. Le projet est toujours en cours d’examen au parlement, mais de nombreuses entreprises s’engagent déjà volontairement pour l’environnement, notamment via l’adoption de plans de mobilité. Le terme désigne l’ensemble des mesures visant à optimiser les déplacements pendulaires ou professionnels des collaborateurs.

Diminuer le nombre de trajets

Le bureau d’ingénieurs Daniel Willi a réduit le nombre de déplacements privés et professionnels de ses collaborateurs en aménageant les horaires de travail.

Subvention d’abonnement de train, achat de véhicules d’entreprises ou modification du temps de travail font partie des mesures mises en place au sein du bureau d’ingénieurs civils Daniel Willi. Basée à Montreux (VD) et à Renens (VD), l’entreprise s’est intéressée au sujet en 2012, suite à une demande de Michel Bloch, délégué au développement durable de ville de Vevey (VD). Ce dernier organisait alors une présentation du plan de mobilité de Nestlé, et souhaitait le comparer à la situation d’une entreprise plus petite.

Avant que le bureau d’ingénieurs ne mette en place son plan, 35 des 50 collaborateurs utilisaient une place de parking. «Nous avons toujours payé le stationnement, pour que les employés puissent arriver devant la porte de l’entreprise avec tous leurs classeurs en rentrant des chantiers, explique Daniel Willi, le directeur. Et les secrétaires y avaient leur voiture, même si elles ne sortaient pas de la journée.»

L’entreprise a commencé par encourager ses collaborateurs à se rendre au bureau en train, en offrant un dédommagement de cent francs par abonnement CFF. Elle a également fait l’acquisition de trois voitures pour les déplacements professionnels, d’un scooter pour les chantiers régionaux situés entre Vevey et Villeneuve, ainsi que d’un abonnement Mobility. À Montreux, ses bureaux sont situés juste à côté de la gare et l’entreprise défraie le taxi si nécessaire. Ces mesures ont permis de diminuer de 15 places l’étendue de son parking. Daniel Willi constate cependant que le covoiturage est impraticable, en raison de l’absence d’horaires fixes. «Il y a trop de rythmes différents, entre des collaborateurs qui aiment commencer très tôt le matin et d’autres qui ont une activité de loisir en fin de journée.»

Autre mesure d’optimisation des déplacements, le temps de travail, de quarante-deux heures, a été réparti sur quatre jours et demi. Une organisation qui a permis de libérer le vendredi après-midi pour des rendez-vous privés, et donc de fortement limiter les absences à d’autres moments de la semaine, réduisant d’autant les déplacements. «En six ans, notre plan de mobilité a été présenté trois fois par des organismes qui dispensent des formations dans le domaine de l’environnement. Il n’a rien d’exceptionnel mais s’avère pratique. Et les collaborateurs jouent le jeu, car ils n’ont rien perdu dans l’opération.»

Allier ses efforts avec ceux des voisins

Dans la périphérie de Genève, le laboratoire d’analyses médicales Covance a intégré un plan de mobilité inter-entreprises.

Situé au cœur de la zone industrielle de Meyrin-Satigny (Zimeysa), le laboratoire d’analyses médicales de la multinationale Covance compte 750 employés. Une forte augmentation du personnel en vingt ans a généré de nombreux défis en termes logistiques, notamment sur le plan de la mobilité. C’est pourquoi un comité de collaborateurs dédié a été mis en place en 2013, avec à sa tête Bertrand Jaton, directeur du centre de veille économique de l’entreprise: «Nous avons souhaité concilier au mieux les demandes émanant des employés avec les volontés de la direction.»

Première mesure adoptée: la promotion des transports publics, via une subvention annuelle de 250 francs versée aux personnes intéressées. Environ 120 d’entre elles en bénéficient aujourd’hui. Un système de covoiturage a également été mis en place. Covance détient ou loue environ 300 places de parking. Une quarantaine d’entre elles, sont désormais réservées aux adeptes de covoiturage, dont une quinzaine à proximité de l’entrée principale des locaux. Sur proposition du comité, la société a également acquis il y a trois ans une flotte de quatre vélos électriques. Ceux-ci servent à se déplacer lors de la pause de midi et se réservent comme une salle de conférence, avec un taux d’utilisation moyen compris entre 40 et 45%.

«Filiale d’une entreprise américaine, il a fallu faire comprendre ces projets auprès de notre direction générale, remarque Bertrand Jaton. Ce qui nous a aidé, c’est le fait de travailler avec de grands groupes pharmaceutiques, qui demandent souvent à ce que leurs prestataires soient engagés d’une manière ou d’une autre sur le plan environnemental.»

Covance a par ailleurs rejoint le plan de mobilités inter-entreprises de la Zimeysa, mis en place en 2013 par la commune de Meyrin (GE), avec le soutien de la société Mobilidée. «Il nous semble important de lier notre politique de mobilité à celle de la commune, et d’agir par rapport à notre empreinte locale.» Outre le partage de certaines infrastructures entre les onze entreprises partenaires et un système de covoiturage global, l’entité organise régulièrement des événements de promotion de mobilité douce, voire des challenges inter-entreprises. Covance a d’ailleurs été lauréat deux années consécutives (2013 et 2014) de ces défis couronnant le meilleur élève du site en matière d’éco-mobilité.

Mutualiser ses locaux

La société Creapole épaule les start-up jurassiennes. Elle a été influencée par l’engagement environnemental de certaines d’entre elles.

Creapole est une petite structure de sept collaborateurs fixes active dans le développement économique du canton du Jura. Depuis ses bureaux de Delémont (JU), elle accompagne des projets, de start-up et soutient les processus d’innovation et de transfert technologique au sein des entreprises jurassiennes. «La sensibilité à une mobilité douce s’est rapidement imposée, étant donné notre interaction avec le développement de projets dans le domaine des technologies vertes», remarque Franziska Zenger, chargée de projets au sein de la société.

Depuis le déménagement de l’entreprise dans ses bureaux actuels, la structure a mis en place une mutualisation des espaces et des moyens de production avec d’autres sociétés de services (notamment EDJ-Energie du Jura SA, la fondation O2, un centre de compétences dans les domaines de la promotion de la santé et du développement durable, ou encore Kinitic, une agence digitale). «Cette approche permet de partager des espaces, mais également des compétences entre les différentes sociétés. Une telle convivialité offre une dynamique très intéressante.»

Les responsables de Creapole ont étudié la mise en place de premières mesures liées à la mobilité en 2010. Parmi celles qui ont été adoptées depuis, on peut citer la participation de l’entreprise à l’achat d’abonnements demi-tarif auprès des CFF, la souscription de deux abonnements Mobility pour une période de deux ans, suivie de l’achat d’un véhicule d’entreprise. L’entreprise a également, fait l’acquisition de deux vélos pour favoriser la mobilité douce pour les trajets courts, ou encore encouragé ces collaborateurs à pratique le covoiturage pour les déplacements professionnels.

Pour les longs trajets, les transports publics, notamment le train, sont largement favorisés, permettant aux employés d’avancer sur leur travail pendant le temps de déplacement. Le temps mort entre deux rendez-vous professionnels n’existe pas. «La responsabilité vis-à-vis de l’environnement et la crédibilité de notre société nous ont montré la direction à prendre. Les collaborateurs ont d’ailleurs très bien accueilli ces mesures.»

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Une version de cet article réalisé par LargeNetwork est parue dans Entreprise Romande.