Le plus prestigieux des prix de la presse francophone a été décerné hier à un journaliste suisse. Serge Michel, 32 ans, est le correspondant de Largeur.com en Iran. Millions de bravos!
C’est une histoire de plume, mais surtout d’œil et d’oreille. Car comme le disait Albert Londres, «un vrai reporter doit d’abord savoir écouter et regarder. Celui qui sait seulement écrire ne sera jamais qu’un littérateur».
Le plus mythique des journalistes français, mort en 1932 lors du naufrage d’un paquebot dans la Mer Rouge, a donné son nom au plus prestigieux des prix de la presse francophone. Des journalistes tels que Bernard Guetta et Armand Gatti ont obtenu cette récompense qui distingue chaque année le meilleur «grand reporter de la presse écrite».
Hier, le Prix Albert Londres a été décerné à un journaliste suisse qui écrit merveilleusement bien et surtout, qui sait «écouter et regarder» comme personne. Installé à Téhéran, Serge Michel n’a pas pu se rendre à Reims pour la remise du prix, doté d’une petite médaille et de 20’000 francs français. «Mais j’ai envoyé quelqu’un pour le recevoir à ma place», dit-il au travers d’une ligne téléphonique crachottante.
Les lecteurs de Largeur.com connaissent bien Serge Michel. Depuis un peu plus de deux ans, il collabore régulièrement à notre magazine.
«J’étais un peu nerveux ce matin, raconte-t-il. Je savais que le lauréat serait nommé aujourd’hui. Il y a un mois, sur le conseil d’un collaborateur du Point, j’avais envoyé ma candidature, avec une dizaine de papiers écrits entre mars 2000 et avril 2001. A tout hasard. Et puis, cet après-midi, j’ai reçu un appel du secrétaire du jury qui m’a dit simplement: bonjour, vous êtes le lauréat du Prix Albert Londres…»
C’est pour pour ses contributions au Figaro, au Temps et au Point que Serge Michel a été couronné. «De tous les articles que j’ai envoyés au jury, dit-il, celui qui me plaît le plus est un reportage que j’ai effectué dans les montagnes kurdes, chez des mystiques qui veulent prouver l’existence de Dieu en avalant des lames de rasoir…»
Serge Michel appartient à la famille des journalistes précoces. Il est né à Yverdon en 1969-année-érotique – et il explique avec une certaine fierté qu’il doit son prénom à Gainsbourg. A vingt ans, il passe son bac et part aussitôt s’essayer à l’art du reportage. Le Mur de Berlin vient de s’écrouler. Il sillonne l’Europe de l’Est et écrit des articles en free-lance qui seront publiés par le Journal de Genève.
En 1992, il entreprend avec le photographe Yves Leresche un long tour d’Europe par les mers. Quatorze mois d’un voyage qui le ménera d’Odessa à Saint-Petersbourg et dont il publiera les épisodes dans le Journal de Genève, El Pais et Courrier International.
En 1994, après une licence en science politique obtenue à Genève, il entre au Nouveau Quotidien. Il obtient le Prix Pascal-Arthur Gonet, part en Russie pour une série de reportages le long des pipe-lines puis s’installe à Zurich d’où il couvre l’affaire des fonds en déshérence et la montée en puissance de Christoph Blocher.
Depuis 1999, il vit à Téhéran. Il vient d’y créer le site Iranreporter.com avec Guy Dinmore, correspondant du Financial Times dans la capitale iranienne. «L’idée nous est venue en novembre dernier, raconte-t-il. On voulait lancer un site spécialisé pour publier des articles indépendants, des reportages de terrain écrits par des journalistes qui se cognent l’Iran au quotidien. Nous allons le financer en vendant des abonnements à une newsletter par e-mail qui sera envoyée plusieurs fois par jour, avec le sommaire du site ainsi que des documents, des alertes et des papiers exclusifs.»
Parallèlement à ce projet, Serge Michel va bien sûr continuer à publier des articles dans la presse francophone, notamment pour Largeur.com.
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Le Prix Albert Londres a été notamment décerné à Anne Nivat, Marc Kravetz, Jean-Claude Guillebaud, Jean Bertolino, Patrick Meney.