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La recherche européenne après le Brexit

La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE) jette une ombre sur l’avenir de la recherche sur le Vieux Continent.

Le Royaume-Uni possède huit des dix meilleures universités européennes, dont quatre figurent dans le top 10 mondial. Bien qu’il ne compte que 0,9% de la population mondiale, il est le quatrième pays le plus prolifique en matière de recherche. Rien d’étonnant donc à ce que le Brexit soulève des questions sur l’avenir de la recherche européenne. Quelles sont les conséquences éventuelles de la décision des Britanniques de quitter l’Union européenne?

Money, money, money

Le prochain programme-cadre européen pour la recherche et l’innovation (FP9) devrait disposer d’un budget de 100 milliards d’euros. Le Royaume-Uni était jusqu’à présent le deuxième plus grand contributeur aux huit précédents programmes-cadres et à la recherche européenne. Un Brexit dur – qui mettrait un terme à la participation du Royaume-Uni au programme – pèserait donc fortement sur le budget. Si le pays investit beaucoup dans la recherche européenne, il en tire aussi de nombreux bénéfices. Dans le cadre du FP7, il avait obtenu la deuxième plus grande part des fonds de recherche: 8,8 milliards d’euros, contre 7,4 milliards pour la France. «Le Brexit devrait se traduire par une augmentation des fonds alloués aux autres pays performants», précise Luc van Dyck, consultant en politique scientifique à EuroScience. Personne ne peut dire si le Brexit sera dur ou doux. Si le Royaume-Uni trouve un accord similaire à ceux conclus par la Norvège et la Suisse, il devrait être un contributeur net au budget de la recherche.

Perte d’un allié

La conception et la planification du FP9 façonneront la recherche européenne des dix prochaines années et influeront sur l’emploi, la croissance et la société. Dans nombre de pays européens, les grands instituts de recherche dominent les débats, tandis qu’au Royaume-Uni et en Suède, les universités ont plus de poids. Pour les pays dont le système de recherche est semblable à celui des Britanniques, le Brexit pourrait se traduire par une perte d’influence. «Auparavant, nous pouvions compter sur le Royaume-Uni pour orienter les négociations sur des sujets comme l’aéronautique ou la santé. Nous risquons de perdre notre plus proche allié», regrette Dan Andrée, conseiller spécial du Ministère suédois de l’éducation et de la recherche.

Un comité spécial de la Chambre des communes a récemment statué que le Royaume-Uni devait donner la priorité à l’accès aux financements européens pour la recherche. Les Britanniques ont donc l’intention de façonner le FP9 tant qu’ils le peuvent encore. «Le pays use de son influence dans le cadre du FP9, ajoute Jan Palmowski, secrétaire général de la Guilde des universités européennes de recherche. Il ne faut pas sous-estimer sa contribution au FP9, ni l’influence des parties prenantes britanniques.»

Moins de mobilité, moins d’innovation

Les restrictions potentielles à la mobilité ternissent toutefois le tableau. «La recherche repose sur la collaboration, donc toute réduction en la matière affecterait la qualité des travaux», déclare Jan Palmowski. Les incertitudes sur la mobilité poussent la plupart des scientifiques européens installés au Royaume-Uni (16% des chercheurs) à envisager de quitter le pays. Certains ont déjà rejoint des universités et des institutions scientifiques de l’UE.

Cet exode devrait profiter aux 27 membres restants. «Le Royaume-Uni a réussi à attirer les cerveaux européens, mais ces derniers conduiront leurs recherches ailleurs, prévient Luc van Dyck. Les principaux perdants dans cette affaire pourraient bien être les universités britanniques.»

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Une version de cet article est parue dans le magazine Technologist (n°14).