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Gagner les élections avec la science

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Des élections majeures se tiendront dans plusieurs pays européens en 2017, notamment en France, en Allemagne et aux Pays-Bas. Dans tous les partis, les candidats préparent leurs arguments de campagne et jusqu’ici, on ne peut pas dire que la science soit au centre des débats. Les formations politiques préfèrent se focaliser sur les sujets liés à l’actualité, à la cohabitation des cultures ou aux réponses à apporter à la menace terroriste. La population a besoin d’être rassurée et les politiciens savent bien qu’on ne gagne pas une élection en défendant le soutien à la recherche.

Et pourtant… Le candidat qui déciderait de se positionner sur le terrain de la science aurait quelques arguments percutants à faire valoir. Tout d’abord parce que c’est seulement dans les laboratoires que l’on trouvera des solutions aux défis en matière de santé, d’environnement ou de mobilité. Des traitements plus efficaces contre le cancer, un air moins pollué dans nos villes, des déplacements plus fluides… Ces perspectives ne suffisent peut-être pas à mobiliser les foules, mais elles font écho aux préoccupations quotidiennes, voire intimes, de nombreux citoyens.

Le candidat qui placera le soutien à la recherche dans son programme bénéficiera, en plus, d’un bonus de crédibilité face à ses rivaux. Dans tous les pays européens, et également aux Etats-Unis, une part importante de l’électorat s’inquiète en effet de voir l’émotion prendre si souvent le pas sur la raison dans le débat public.

Des politiciens cèdent à la tentation populiste en simplifiant les enjeux et en dénigrant les experts, les faisant passer pour des technocrates, voire des imposteurs. Ils parviennent ainsi à séduire une partie de l’opinion, mais une partie seulement. La majorité des électeurs sait bien que l’habileté oratoire ne remplace pas la compétence.

En Allemagne, en France, aux Pays-Bas, mais aussi en Norvège, en Hongrie, en République tchèque ou encore en Slovénie, les élections majeures qui s’annoncent pour 2017 permettront ainsi aux candidats de montrer quels dossiers ils maîtrisent réellement. Ceux qui se placeront du côté des scientifiques, dans le camp de la raison, et qui sauront ramener le débat sur le plan factuel disposeront d’un avantage d’autorité sur leurs concurrents populistes.

Mais comme toujours, ce sera surtout la qualité des arguments économiques qui pourra faire pencher la balance. A droite comme à gauche, de nombreuses formations insistent sur l’importance d’encourager l’innovation pour assurer la croissance et créer les emplois de demain. Elles ont évidemment raison. Mais elles pourraient faire un pas supplémentaire en défendant la recherche au sens large, y compris la recherche fondamentale, car c’est souvent dans son sillage que se multiplient les start-up.

L’innovation ne naît pas de l’intuition géniale d’un individu isolé. Elle a besoin d’échanges d’idées, de collaborations, de réseaux de financement et d’un terreau favorable à la prise de risque. Les candidats qui souhaitent améliorer la compétitivité de leur région ou de leur pays ont donc tout avantage à se placer résolument du côté des chercheurs. Ils gagneront en efficacité et bénéficieront en plus d’un transfert d’image positif. Car la recherche européenne, c’est un formidable réservoir d’histoires humaines faites de défis, d’échecs et de persévérance qui aboutissent à des innovations concrètes. Des histoires enthousiasmantes qui peuvent dynamiser une campagne et renvoyer dans les cordes les déclinistes et les démagogues.
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Une version de cet éditorial est parue dans le magazine Technologist (no 10).

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