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Martin Stiksel, le chasseur de contenu

Le fondateur de Last.fm revient avec un projet encore plus ambitieux et veut organiser l’ensemble du web en fonction du comportement de chaque utilisateur.

L’entrepreneur autrichien Martin Stiksel a connu un grand succès avec son site de recommandation musicale Last.fm. Son nouveau projet, Lumi, va encore plus loin et vise à sélectionner le contenu en ligne qui correspond le mieux aux préférences d’un utilisateur.

Lumi repose sur le même principe de «filtrage collaboratif» que Last.fm. Il enregistre l’historique de navigation d’un utilisateur et le compare à celui d’autres internautes avant de faire des recommandations. Les utilisateurs peuvent faire des recherches par sujet ou par mot clé, en ajoutant des pages à leurs propres collections thématiques personnalisées. Lancé en 2013, le service compte actuellement 25’000 abonnés.

Martin Stiksel révèle les défis de gérer une startup technologique, et pourquoi il est reparti de zéro.

Comment avez-vous fondé Last.fm?

Je travaillais à Londres comme journaliste musical pour la radio et la télévision autrichienne.

En 1999, Felix Miller et moi avons lancé une plateforme d’hébergement musical pour les groupes sans label. Nous n’avions aucune expérience dans le domaine de la programmation, et le premier site web que nous avons conçu était basique, mais nous avons été rapidement inondés de chansons excellentes.

Puis nous avons découvert le concept de filtrage collaboratif: «eux qui écoutent ceci écoutent également cela». Mais les tentatives de recommandations musicales étaient déjà nombreuses: notamment en comparant les ondes sonores de différentes chansons ou en demandant à des gens de lister leurs groupes favoris. Notre innovation a
été d’exploiter les données musicales disponibles des utilisateurs (voir Le pionnier des recommandations musicales). Amazon utilisait ce procédé pour les livres, mais nous l’avons développé à une échelle nettement plus grande. On ne peut lire que 10 livres par an, mais on écoute des milliers de chansons.

Pourquoi avoir vendu la société à CBS Interactive en 2007?

Le monde de la musique en ligne devenait saturé, et les maisons de disques s’inquiétaient de la violation du droit d’auteur. Le fait de disposer d’un partenaire important dans le secteur nous a vraiment aidés. Aujourd’hui, la musique en ligne est devenue un domaine excessivement coûteux pour une startup,
car les maisons de disques exigent un paiement initial pour l’hébergement de leur musique.

Qu’avez-vous fait après avoir quitté last.fm en 2009?

Nous avons pris des vacances prolongées, les premières en sept ans, car diriger une startup est une activité intense. Puis, nous avons repris les discussions et réalisé que nous pouvions concevoir un système de recommandations au-delà de la musique, que nous avons baptisé Lumi. Les autres entreprises recueillent des informations sur la navigation à l’insu des intéressés en vue de cibler la publicité, mais personne, à l’exception de Lumi, ne le fait au profit de l’usager.

Pourquoi devrais-je utiliser Lumi?

Ce système identifie vos centres d’intérêt, en fonction des sites web que vous consultez. On me demande parfois «Pourquoi aurais-je besoin de davantage de contenu, j’en ai déjà tellement?». C’est tout le problème: nous sommes confrontés à un flot d’informations, comme par exemple les flux de Twitter. Mais ce n’est pas parce que vous êtes ami avec quelqu’un que vous partagez ses goûts musicaux ou appréciez ses recommandations culinaires. Plus vous suivez de gens sur Twitter ou Facebook, plus vous devez élaguer du contenu non filtré, ce qui devient trop lourd à gérer. Avec Lumi, le système s’améliore avec le nombre d’usagers, car nous nous appuyons sur l’historique
de navigation de personnes partageant les mêmes intérêts. Si vous vous intéressez à l’histoire ancienne turque, vous pouvez consulter les
pages déjà visitées par
les autres utilisateurs.

L’implantation au Royaume-Uni a-t-elle constitué un atout ou un frein?

Cela s’est révélé appréciable, car il y est assez facile de démarrer une entreprise. Il y a davantage de formalités administratives et d’investissements nécessaires dans nos pays d’origine, l’Allemagne
et l’Autriche.

Un conseil pour les startups?

Il faut trouver le bon concept en étudiant les données générées par les utilisateurs. Validez ou non votre projet aussi vite que possible et à moindres frais, puis passez à la suite.

D’autre part, suivez toujours votre première bonne idée. Nous avons mis trois ou quatre ans avant de récolter les fruits de Last.fm, et nous avons connu des périodes difficiles: nos parents se demandaient ce que nous allions devenir, à dépenser tout l’argent que nous avions gagné.

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ENCADRE

Le pionnier des recommandations musicales

Lancé à Londres en 2002, Last.fm est l’un des premiers services de recommandation musicale, reposant sur un système appelé Audioscrobbler qui traque chaque écoute d’un morceau sur l’ordinateur ou l’appareil portable d’un utilisateur afin d’élaborer un profil détaillé de ses goûts. En comparant les profils de 55 millions d’utilisateurs enregistrés, le système peut signaler des artistes qui ont pu passer inaperçus. En 2007, Last.fm a été cédé au groupe de médias américain CBS Interactive pour 140 millions de livres.
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Une version de cet article est parue dans le magazine Technologist (no 3).