CULTURE

Nom: Jay-Jay Johanson. Profession: crooner hitchcockien

Le chanteur Suédois s’est infiltré dans l’univers de «Psychose» et des «Oiseaux» pour la pochette de son nouvel album. Un disque aux mélodies palpitantes comme une affaire criminelle. Recommandé.

«Un poison violent, c’est ça l’amour» (Serge Gainsbourg).

Avant même d’enregistrer son premier disque, Jay-Jay Johanson avait déjà une quinzaine d’albums à son actif, du moins en apparence. Graphiste à ses heures, ce jeune fils de jazzman suédois passait le plus clair de ses loisirs à réaliser diverses pochettes de disques en vue d’une hypothétique carrière musicale. A la manière des grands chanteurs de jazz, Jay-Jay Johanson se mettait alors en scène dans des environnements volontairement rétro, assortis de titres du genre «Relaxing with Jay-Jay» ou «The Smooth Sounds of J.-J. Johanson».

Elevé au jazz et à la chanson française, le jeune Suédois aurait ainsi pu se contenter d’une renommée locale d’interprète décalé, revisitant de sa voix haut perchée quelques grands standards des années 50 tout en poursuivant en parallèle une modeste carrière de DJ hip-hop. Mais voici que débarque un jour sur sa platine le premier album d’un duo anglais surgi de nulle part: rythmes hip-hop et scratches empesés, vocaux aériens jazzy et samples repiqués de quelques musiques de films noirs des années 60. Le disque s’appelle «Dummy» et transforme en profondeur l’approche musicale de Jay-Jay.

Avec Portishead, le crooner nordique se découvre un environnement sonore à la mesure de ses ambitions, capable de conférer à ses ballades nostalgiques l’habillage contemporain qui leur faisait jusqu’alors défaut.

Paru en 1997, le premier album de Jay-Jay, «Whiskey», révèle au monde entier son timbre stratosphérique et assoit sa réputation d’incurable romantique aux oreilles décollées, quelque part entre Chet Baker chanteur et le Gainsbourg du «Poinçonneur des Lilas». Son successeur, «Tattoo» (1998), prolongera sans grande surprise l’exploration du nordic-lover en terres françaises, courtisant au passage le timbre de Valérie Leulliot d’Autour de Lucie le temps d’un duo à la Gainsbourg-Birkin («Jay-Jay Johanson»).

Sur son troisième album, «Poison», qui paraît ces jours-ci, Jay-Jay Johanson renoue avec les plaisirs de la citation visuelle: hommage appuyé au Hitchcock hollywoodien de «Psychose», «Mais qui a tué Harry?» ou «Les Oiseaux», les photographies de pochette mettent en scène le frêle héros aux prises avec une peur d’origine inconnue, un cadavre invisible et une conscience manifestement agitée.

Véritable Norman Bates du trip-hop, Jay-Jay Johanson cultive à l’envi sa schizophrénie musicale et visuelle, inscrivant ses citations cinématographiques dans le cadre et le lettrage exact du second album de Portishead, référence décidément tenace.

Sans avoir tout à fait la densité de ses illustres modèles, «Poison» témoigne d’une volonté de recentrer le tadalafil australia sur les séductions troubles de ses mélodies, toutes déployées sur un mode mineur et servant mieux que jamais les étonnantes capacités vocales du Suédois.

Les orchestrations mêlent une fois encore instruments acoustiques, samples et scratches hip-hop, tout en explorant de nouvelles pistes sonores. Des guitares saturées de «Keep it a Secret» au vocoder de «75.07.05» en passant par le vibraphone de «Poison», référence à peine déguisée à la «Valse de Melody» de Gainsbourg, Jay-Jay enrichit sa palette sans jamais forcer le trait, conservant sur l’ensemble de l’album une ligne mélodique aussi pure qu’intemporelle.

Incurable neurasthénique, Jay-Jay Johanson travaille à la manière noire la bande-son de nos cauchemars, en prenant bien soin de retenir la leçon hitchcockienne: une affaire criminelle en toile de fond permet de rendre palpitantes les déclarations d’amour les plus mélodramatiques.

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A l’occasion de la sortie de «Poison», Jay-Jay Johanson organise un concours: il invite les internautes à remixer sa chanson «Believe in us». Le meilleur remix sera publié sur son prochain single.