LATITUDES

Trouver l’amour au concert

Une start-up bernoise organise des rendez-vous pour célibataires lors d’événements de musique classique et de jazz. Le procédé remporte un joli succès en Suisse alémanique et Konzertliebe prévoit une expansion romande.

Corinne et Romano se sont rencontrés à un concert de fado début février à Zurich. La magie a peut-être opéré grâce à la voix de la chanteuse Ana Moura. Ou en raison du cadre enchanteur du Kaufleuten. Le couple doit en tout cas une partie de son bonheur à la start-up Konzertliebe.

Depuis le début de l’année, la jeune entreprise bernoise orchestre des blind dates dans des représentations de musique classique, de jazz et de musique du monde en Suisse alémanique. Le fonctionnement? Les participants s’enregistrent via l’internet pour le spectacle souhaité et reçoivent une place à côté d’un autre inscrit qui leur correspond, avec une certitude: ils partagent les mêmes goûts musicaux.

«Je les installe en fonction de leur âge et de leur sexe, explique Eva Pauline Bossow, pétillante directrice deKonzertliebe. La culture fonctionne à la fois comme un aimant et comme un filtre. Je ne demande pas aux participants quel niveau de formation ils ont ou ce qui les intéresse.» Durant la pause et à la fin de la représentation, tous les célibataires s’échappent dans une discrète salle spécialement réservée pour faire plus ample connaissance et maximiser les chances de nouvelles rencontres autour d’un verre. «Les sites de rencontre sur l’internet, très peu pour moi, raconte Corinne, psychologue du travail de 37 ans. J’ai décidé de m’inscrire à Konzertliebe car j’étais sûre de passer une bonne soirée quoi qu’il arrive grâce à la musique. Je savais que ce serait aussi l’occasion de parler avec des gens que je trouverais intéressants. Romano et moi n’étions pas placés côte à côte pendant le spectacle. Nous nous sommes parlé à l’apéro, il m’a demandé mon numéro et nous nous sommes revus.»

Konzertliebe — littéralement en français «amour de concert» — a rapidement trouvé son public: les six soirées organisées par la start-up ont affiché complet et Eva Pauline Bossow limite le nombre de places disponibles à une soixantaine, afin que l’opération conserve un caractère intime. Le tarif s’échelonne de 120 à 210 francs et comprend la musique, la réception et le travail de la petite équipe qui s’assure du bon déroulement de l’événement et transmet les jours suivants les demandes de contact de ceux qui n’auraient pas osé se lancer sur le moment. Les clients sont âgés de 25 à 75 ans et, contrairement aux autres offres pour célibataires, le concept attire davantage de femmes que d’hommes.

«Certains participants font le déplacement depuis des cantons éloignés et même de l’étranger: une personne est venue de Rome et une autre de France exprès pour l’occasion, raconte Eva Pauline Bossow. Des gens déjà en couple me contactent simplement pour me dire qu’ils trouvent l’idée charmante…»

L’Allemande de 29 ans, arrivée en Suisse il y a dix ans pour suivre des études à l’Université de Fribourg, a décidé de jouer les Cupidons à la lecture d’une étude dans le cadre de son travail dans la communication pour l’Orchestre symphonique de Berne. Le document indique que parmi tous les types de concerts, ceux de musique classique et de jazz attirent le plus de célibataires. Elle y voit immédiatement une opportunité, teste son projet lors de deux soirées en 2010 et finit, deux ans plus tard, par fonder sa société.

Konzertliebe, dont le modèle d’affaire repose sur les prix préférentiels pratiqués par les organisateurs de concerts et qui espère pouvoir compter prochainement sur le soutien de sponsors, mise sur une expansion géographique progressive. Le temps de trouver les partenaires adéquats, Eva Pauline Bossow s’imagine un lancement sur le marché romand en début de l’année prochaine, probablement à Lausanne et à Genève.
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Une version de cet article est parue dans L’Hebdo.