LATITUDES

Debout pour travailler plus sainement

Mauvaise pour le dos, une position assise peut aller jusqu’à provoquer des cancers. De plus en plus d’entreprises, à l’instar de l’UICN à Gland, cherchent à adapter leur environnement.

Scotchés sur leurs chaises, les yeux rivés sur l’écran, les salariés ne bougent plus. Avec la tertiarisation de l’économie, la plupart des emplois sont devenus bureautiques, et donc désespérément assis. «Désespérément», parce qu’en plus d’être mauvaise pour le dos, de favoriser l’embonpoint et donc les maladies cardiovasculaires, une position assise prolongée favorise les cancers colorectaux, selon une récente étude.

Comment les entreprises peuvent-elles répondre à ce nouveau mal? «Il faut intégrer le mouvement dans nos activités de tous les jours, répond Lucienne Bigler-Perrottin, directrice de la Ligue genevoise contre le cancer et infirmière spécialisée en oncologie. A l’image des automobilistes qui ont pris l’habitude de s’arrêter durant de longs trajets, il devrait en être de même au travail. Les Chinois pratiquent la gymnastique le matin, pourquoi ne pas les imiter, et même toutes les heures s’il le faut?»

Une innovation venue de Scandinavie peut en partie régler le problème: le bureau à hauteur réglable, qui permet d’alterner position assise ou debout par un mécanisme manuel ou électrique (entre 2500 et 4000 francs la pièce). A Gland, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a adopté dès mars 2010 cet aménagement dans son nouveau bâtiment pour les postes situés en open space. «Je ne suis pas particulièrement sujette aux problèmes de dos, mais je trouve le système très efficace pour éviter de se cambrer en restant assise, raconte Carla Duarte, une collaboratrice de l’UICN. J’essaie de changer de position plusieurs fois par semaine, voire une fois par jour en fonction des tâches qui m’occupent.»

Principal avantage de ces bureaux: l’amélioration de la circulation sanguine dans les jambes, ainsi qu’une meilleure concentration par le changement de position et l’action, car on bouge davantage en étant debout.

Les collaborateurs de l’UICN qui disposent de bureaux à hauteur réglable sont toutefois très peu nombreux à en faire réellement usage. «90% des employés restent en position assise, constate Christian Laufenberg, responsable des services généraux de l’UICN. Ils utilisent la fonction électrique principalement pour ajuster la hauteur relative de la position assise.»

Une tendance confirmée par Jean-Charles Migotto, patron de l ‘entreprise Line Office qui commercialise ce type de bureaux. «Cet aménagement est surtout adapté à des zones où les collaborateurs ne sont pas constamment présents.»

Pour les autres, Corinne Clerc, directrice commerciale pour la Suisse romande de Kinnarps (l’entreprise qui a fourni les bureaux à l’UICN), explique qu’ il vaut mieux se concentrer sur l ‘aménagement de l’espace de travail: «Il y a vingt ans, la tendance consistait à disposer de tout à portée de main, pour se déplacer le moins possible. Aujourd ‘hui, il faut amener chacun à bouger, en trouvant son identité au sein de l’entreprise.»

La directrice préconise par exemple l’usage de systèmes d’impression centralisés, des pauses imposées ou encore la création de zones de réunions informelles effectuées debout qui favorisent la réactivité et les contacts. «Il s’agit de réfléchir aux besoins et au fonctionnement de chaque entreprise afin de mettre en place des solutions. Les produits s’adaptent dans un second temps.»

L’Union internationale contre le cancer (UICC) recommande de se tenir le dos droit et les épaules en arrière, d’effectuer régulièrement des exercices de stretching, de se lever toutes les demi heures pour faire un tour et décentrer son attention de l’écran, inspirer profondément quelquefois en bloquant son estomac quelques secondes et boire beaucoup d’eau. Reste le principal défi, selon Dominique Monnin, physiothérapeute aux HUG: «Convaincre les entreprises que bouger au travail est loin d’être une perte de temps.»
_______

Une version de cet article est parue dans PME Magazine.