Pour Peter van Bladeren, le directeur du Centre de recherche de Nestlé, la nutrition du futur sera personnalisée, suivant le profil génétique de chacun.
Que mangerons-nous en 2030? Certainement pas des pilules, contrairement aux projections des films d’anticipation des années 1970. Non, la notion de plaisir devrait rester au cœur de l’alimentation du futur si l’on en croit Peter van Bladeren, directeur du Centre de recherche de Nestlé, basé à Lausanne.
Mieux, les goûts et préférences de chacun seront au centre des préoccupations: «La nutrition du futur sera personnalisée. Grâce aux progrès en matière de diagnostics médicaux, et notamment l’établissement du profil génétique individuel, tout le monde saura exactement de quel aliment il aura besoin.»
L’avenir qui se dessine confirme une tendance déjà amorcée ces dernières années, avec une influence grandissante de la «health food». Plus que jamais, l’alimentation devrait constituer un moyen d’entretenir et même d’améliorer sa santé: «C’est dans cette direction que nous allons, explique Peter van Bladeren. L’un des aspects les plus importants concerne l’établissement de diagnostics pointus sur la physiologie des gens. L’an dernier, nous avons ainsi amorcé une collaboration avec la firme General Electric, à la pointe dans le domaine de l’imagerie médicale. Ces technologies nous permettent de mieux comprendre comment la nutrition et le style de vie influencent le métabolisme et la composition du corps (masse graisseuse ou musculaire, minéralisation des os, etc.).»
Les recherches vont dans le sens d’une nourriture plus saine et équilibrée: «Nous nous concentrons sur la balance idéale des ingrédients dans nos produits, en cherchant notamment à diminuer les quantités de graisse, de sucre ou de sel.» Mais comme ces avancées ne doivent pas se faire au détriment du goût, les chercheurs redoublent d’effort pour combler malgré tout les désirs des consommateurs. «Dans nos laboratoires, nous élaborons par exemple un goût proche de celui de la graisse, sans effets dommageables sur la santé. Idem pour le sucre.»
Dans ce contexte, le secteur des «alicaments» va logiquement continuer de prospérer, avec des produits toujours plus efficaces, à l’intention par exemple des personnes allergiques.
«Actuellement, nous proposons quelques produits hypoallergéniques qui continueront à s’améliorer. La prochaine étape consisterait à intégrer des substances antiallergiques directement dans des aliments, comme c’est le cas avec les médicaments.»
émotions. Dans un autre registre, les questions sanitaires et de sécurité sont également au centre des travaux du Centre de recherche: «Nous nous efforçons d’anticiper les menaces futures pour nos produits, tels que de possibles contaminations ou problèmes microbiologiques», souligne Peter van Bladeren.
Et les avancées scientifiques ne s’arrêtent pas là. En plus des études cliniques menées dans son centre sur des échantillons de population, Nestlé a initié, il y a trois ans, un projet commun avec l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), baptisé «Food and emotion». «L’objectif de ce programme est d’explorer l’influence des aliments sur le fonctionnement du cerveau. Nous savons que certains aliments agissent positivement sur l’humeur. Avec l’EPFL, nous cherchons à mieux comprendre ces mécanismes.»
Pour leurs expériences, les chercheurs recourent essentiellement à la culture cellulaire et à l’imagerie cérébrale. «Nous constatons que certains aliments ont un effet neuroprotecteur, ou encore qu’ils stimulent des fonctions cognitives, explique Pierre Magistretti, directeur du Brain Mind Institute. Il apparaît également que des connexions nerveuses existent entre l’intestin et le cerveau; en fonction de ce que l’on mange, notre humeur se trouve différemment influencée. Tous ces mécanismes sont aujourd’hui de mieux en mieux compris.»
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Extrait d’une série, cet article a été publié dans PME Magazine à l’occasion des 20 ans de la publication, en mai 2009.
