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Le sommet des éclopés n’a même pas accouché d’une souris

Convoquée avec une légèreté inhabituelle, sans préparation réelle sinon une série d’allers et retours diplomatiques de Condoleezza Rice, la conférence d’Annapolis était vouée à l’échec quant à son objectif principal, la paix au Moyen-Orient.

Mais George W. Bush a pu apparaître sur toutes les chaînes de télévision en serrant la main d’Ehud Olmert et Mahmoud Abbas, images non négligeables au moment où ses amis républicains entrent dans le vif de la campagne présidentielle.

Dire de George W. Bush qu’il n’est à l’entrée de sa huitième année de fonction que l’ombre d’un président, un ectoplasme politique divaguant dans la sphère des fantômes et des djinns n’est pas insulter la réalité. Soumis à l’électrochoc du 11 septembre 2001, il a réagi en frappant à tort et à travers des ennemis invisibles mais omniprésents. Ce n’est pas parce que les téléjournaux ne montrent plus les horreurs qui se produisent quotidiennement en Irak ou en Afghanistan que les dévastations n’existent pas.

Ehud Olmert, successeur d’un Ariel Sharon en coma prolongé depuis deux ans, se trouve, lui, dans une sorte de coma politique: son gouvernement est phagocyté par les petits partis d’extrême droite auxquels il doit sa majorité parlementaire et, sur le plan personnel, il est l’objet d’une série de poursuites pénales qui lui enlèvent toute crédibilité.

C’est un homme au bout du rouleau qui tente de gérer un pays qui, sans l’aide américaine (quelque trois milliards de dollars par an depuis 1973!), devrait revoir de fond en comble sa politique tant intérieure qu’extérieure.

Mahmoud Abbas ne représente quant à lui que la figure très symbolique de président d’un Etat qui n’existe pas, d’une Autorité palestinienne qui a perdu tout pouvoir à Gaza. Il n’a ni le charisme d’un Arafat sur la scène internationale, ni la capacité politique d’affirmer son pouvoir sur les siens. Alors que ses deux interlocuteurs relèvent du domaine fantomatique, il tient lui du bibelot. En politique cela pourrait s’appeler une marionnette. Vu son immobilisme, il est plus correct de parler de potiche.

Or l’on a jamais vu deux fantômes et un potiche parvenir à régler un imbroglio international.

Le plus grave dans l’affaire est qu’au-delà du jeu entretenu par des politiciens sur le déclin, il n’est pas possible de miser sur l’avenir. Avec ce que l’on voit de la campagne électorale, il est évident que le rapport des Etats-Unis avec Israël ne peut pas évoluer dans un avenir proche. Les Etats-Unis sont en panne de politiciens de haut vol capables de recentrer une politique étrangère ressentie comme catastrophique dans le monde entier. C’est dire que les lobbies conservateurs juifs et chrétiens ont encore de beaux jours devant eux. Et que le soutien à Israël n’est pas près d’évoluer.

Mais, dira-t-on, l’affaire ne concerne-t-elle pas avant tout les citoyens israéliens? Il est vrai que depuis l’assassinat d’Yitzhak Rabin en 1995, les partisans de la paix semblent tétanisés. Ce silence est en grande partie dû à la formidable mutation que la droite israélienne a imposée au pays en ouvrant toutes grandes les portes aux juifs (ou prétendus tels) d’Europe orientale et de Russie. Leur afflux a fait pencher la balance vers l’extrême droite fascisante et un racisme anti-arabe à fleur de peau. Le retour probable de Benyamin Netanyahou au pouvoir après les prochaines législatives ne va rien arranger.