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Dimanche: les vraies raisons qui expliquent l’intérêt des éditeurs

Le nouveau journal dominical de Ringier, qui paraîtra à la fin du mois, dispose d’un très fort potentiel. En Suisse alémanique, la part de marché de la presse du dimanche a presque doublé en huit ans.

Alors que le premier numéro de dimanche.ch est attendu pour le 28 novembre, les contours de la presse romande rappellent ceux de la presse alémanique en 1987. Le SonntagsBlick règne alors seul sur le marché dominical. Le groupe zurichois Ringier en est l’heureux éditeur. Au quartier général de la Dufourstrasse, on affiche un sourire amusé lorsque TA-Media, l’éditeur du Tages Anzeiger, se met en tête de lancer un titre concurrent dans le segment supérieur, la SonntagsZeitung.

Douze ans plus tard, la SonntagsZeitung n’a pas seulement survécu: elle a trouvé un nouveau public tout en grignotant le lectorat de son concurrent. Son tirage est encore de 115’000 exemplaires inférieur à celui du SonntagsBlick (332’000 exemplaires), mais elle empoche plus de 60% du volume publicitaire. Le titre a peut-être moins de lecteurs, mais les siens ont davantage d’argent à dépenser que ceux du SonntagsBlick. Un argument non négligeable pour les annonceurs. Détail piquant, c’est Ringier, l’éditeur qui jouissait autrefois d’un monopole avec le SonntagsBlick, qui s’attaque aujourd’hui en Suisse romande au monopole que détient Edipresse avec Le Matin Dimanche.

Bien que tapageuse, la guerre des scoops que se livrent les deux titres alémaniques n’est pas déterminante en termes commerciaux. Les ventes ne sont pas dopées par les révélations saignantes, observe Raymond Lüdy, rédacteur en chef de Media Trend Journal. Les informations exclusives contribuent surtout à l’image du titre et sont donc parculièrement importantes pour le SonntagsBlick, qui se veut un journal très réactif à l’actualité.

Les scoops peuvent même être contre-productifs, poursuit Raymond Lüdy. La SonntagsZeitung a enregistré de nombreux désabonnements de la part de lecteurs choqués par « l’affaire Jagmetti ». En janvier 1997, le journal avait publié des notes confidentielles écrites par l’ambassadeur suisse aux Etats-Unis, au plus fort de la crise des fonds juifs. Dans celles-ci, Carlo Jagmetti utilisait notamment le terme de « guerre ». Une semaine à peine après la publication de l’article, l’ambassadeur avait dû quitter son poste.

Le succès de la presse dominicale est spectaculaire en Suisse alémanique. Depuis 1990, le volume des annonces a progressé de 45%. Sur l’ensemble des publicités qui paraissent dans la presse, la part de marché des journaux du dimanche a presque doublé en huit ans, passant de 2,2 à 4,1%. Même tendance du côté du tirage: le SonntagsBlick et la SonntagsZeitung affichent ensemble une progression de 14,4% à 550’000 exemplaires.

D’après l’analyse de Ueli Custer dans l’édition de novembre de Mediatrend, il y a en Suisse romande un fort potentiel pour la presse dominicale. Au début des années 90, le tirage cumulé de La Suisse Dimanche et du Matin Dimanche a presque atteint 300’000 exemplaires. Or, le tirage du Matin Dimanche, depuis qu’il est seul sur le marché, culmine aux alentours de 225’000 exemplaires. La différence entre les deux chiffres indique qu’il y aurait – en théorie – un potentiel de 70’000 exemplaires pour d’autres titres dominicaux. La proportion de foyers romands qui lisent la presse du dimanche a chuté de quatre sur dix (1990), lorsqu’il y avait deux titres, à trois sur dix (1998) quand il n’y en a plus qu’un seul.

En Suisse romande, le volume des annonces n’a jamais retrouvé le niveau de 1993, lorsqu’elles se partageaient entre Le Matin Dimanche et La Suisse Dimanche. Avec la disparition du quotidien genevois en 1994, le volume a régressé de plus de 20% et il a stagné jusqu’en 1997. Puis, avec l’apparition d’Info Dimanche, tout imparfait qu’il fût, le volume total est presque remonté au niveau de 1993. Tout se passe comme si un nouveau titre générait automatiquement une quantité supplémentaire de lecteurs et d’annonces.

Les chiffres de la REMP (Recherches et études de médias publicitaires) montrent que le SonntagsBlick touche un public ayant suivi la scolarité obligatoire, tandis que la SonntagsZeitung s’adresse à un lectorat de formation supérieure. Le Matin Dimanche ratisse plus large. Ce sont les lecteurs de formation intermédiaire qui montrent le plus d’affinités avec le titre. Le lectorat de la scolarité obligatoire s’y reconnaît moins. Il serait dès lors abusif d’assimiler Le Matin Dimanche à un journal de boulevard du type du SonntagsBlick.

Reste que la couverture du Matin Dimanche semblera lacunaire aux annonceurs qui ciblent les consommateurs à haut revenu. Et cela malgré un taux de pénétration de 50%. En outre, l’extinction de La Suisse laisse un vide à Genève, où le taux de pénétration du Matin Dimanche n’est que de 33%, contre 62% dans le Valais.

On le sait, dimanche.ch proposera l’adaptation d’articles de son titre-frère, le SonntagsBlick. Paradoxe: il lui faudra séduire un lectorat au sein des classes supérieures sur la base d’un matériel destiné à un tout autre public.

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Mary Vacharidis, journaliste, est domiciliée à Zurich. Elle travaille pour la Télévision suisse romande et collabore régulièrement à Largeur.com.