tadalafil professional

La presse romande, c’est du gâteau pour Christoph Blocher

Entarté lundi à Lausanne, le politicien zurichois mène une opération de charme dans la partie francophone du pays. La presse locale boit ses paroles sans réagir.

L’entartage de Christoph Blocher lundi dernier au Cercle de la presse à Lausanne était plus gamin que méchant, et les téléspectateurs romands n’ont sans doute retenu que l’image fugitive du politicien zurichois essuyant son complet. Dommage, c’est juste après qu’il fallait regarder. Pas le dos du Christoph national s’adressant à un aéropage de distingués rédenchefs et éditorialistes de choc, mais les visages de ces derniers. Ravis, béats, pâmés, bouche bée face aux bons mots de l’orateur.

D’ailleurs, il suffisait d’entendre les quelques questions posées par le reporter du TJ pour prendre la mesure de l’esprit critique qui soufflait en ce lieu:
– Que pensez-vous d’Expo.01?
– Oh, je pense qu’avec 900 millions, elle a déjà assez reçu comme cela et qu’il ne faut pas donner davantage…
Tout ça dit d’un ton bonhomme et apparemment réaliste.

Je ne fais pas partie de ceux qui veulent à tout prix sauver l’expo moribonde, mais affirmer qu’elle dispose de 900 millions est tout simplement une contre-vérité, la manifestation ayant à ce jour obtenu 130 millions de la Confédération, pas davantage.

Un journaliste consciencieux aurait relevé ce tripotage de chiffres dont Blocher est coutumier, mais là non, pas le temps sans doute. Pas le temps non plus de lui demander si lui, Blocher, entrepreneur et multimillionnaire payant volontiers la rénovation de clochers dans les vallées où coule la source antieuropéenne, avait versé ne serait-ce qu’un franc au dernier projet national du millénaire, et si non pourquoi.

Pas un mot non plus sur le fait qu’un membre de l’UDC pétri de sympathies pour l’extrême-droite, voire légèrement pronazi (c’est le troisième en un mois) vient d’être dévoilé par le SonntagsBlick.

Pourtant la presse romande sait prendre du temps pour écouter Blocher qui se dit si volontiers victime d’une «diabolisation médiatique». Couverture flatteuse dans L’Hebdo, grande interview pas trop rentre-dedans dans 24 Heures… On lit les propos de Blochinou et on aurait presque envie de voter pour lui. Justement, les élections approchent. Vous auriez l’esprit vraiment mal tourné de dénoncer une opération de charme en direction de la Suisse romande où, manque de pot, l’UDC blochérienne reste mal implantée.

Coïncidence, le jour même où Blocher faisait le beau devant les «opinion leaders», le rédenchef adjoint du SonntagsBlick, Werner de Schepper, venait précisément expliquer aux journalistes stagiaires de Suisse romande comment on pratique un journalisme curieux et critique, celui qui préfère demander des comptes aux détenteurs de pouvoir que de suivre agenda et conférences de presse.

De Schepper a été plutôt mal reçu par une salle hostile, surtout soucieuse des dérapages qui gâchent l’image du métier (il y en a, c’est vrai, et ils doivent être sévèrement signalés). Mais quand, pour situer le niveau de connaissance des rédacteurs, il fut demandé qui parlait l’allemand ou lisait la presse alémanique, trois mains sur dix-sept se levèrent.

Christoph Blocher peut dormir tranquille. Ce n’est pas demain que les fins limiers romands seront à ses trousses.