Le sociologue Pascal Lardellier, professeur à l’Université de Bourgogne à Dijon, publie un livre sur le phénomène des rencontres en ligne. Interview.
Dans le cadre de notre grand dossier sur les rencontres online, nous avons interrogé le sociologue Pascal Lardellier, professeur à l’Université de Bourgogne à Dijon, auteur de «tadalafil 20 mg by ranbaxy», un livre sur le phénomène des rencontres en ligne.
Quelle est cette «crise de la rencontre» dont vous parlez dans votre livre?
Le nombre de célibataires en France est passé de 6 à 13 millions depuis 1980. C’est le «syndrome Bridget Jones», qui touche en particulier les 28-40 ans, la population la plus représentée sur les sites de rencontre. La durée de vie des couples ne cesse de se raccourcir: à Paris, un mariage sur deux dure moins de cinq ans. Une évolution qui se mesure dans tous les pays occidentaux.
En même temps, la drague traditionnelle – la danse de salon, le rock, le slow, les fêtes de quartier ou de village – s’est ringardisée. Aujourd’hui, 95% des gens qui sortent en boîte dansent seuls. A cette solitude des urbains s’est aussi ajoutée une glaciation des rapports homme-femme et leur judiciarisation par les menaces pour harcèlement.
Dans ce climat, l’internet apporte une réponse bienvenue, confortable et rassurante. Le Net a aussi changé la vie de deux catégories importantes de population: les mères célibataires, qui n’ont plus la possibilité de sortir, et les hommes timides.
Est-ce aussi le choix de l’efficacité sentimentale?
Et de l’économie: l’abonnement à un site de rencontres typique coûte à l’homme environ 30 euros pour un mois, soit beaucoup moins qu’une soirée en boîte. C’est aussi économique émotionnellement: on s’implique à son rythme et on peut à tout moment disparaître. En permettant le contrôle total de la relation, internet réalise le rêve de la relation moderne.
Femmes et hommes ont-ils une approche différente de cet outil?
Le Net sentimental permet à la femme de devenir une reine qui dispose librement de ses prétendants. Une fois que le candidat passe le ratio taille-poids, elle va évaluer son pedigree social. Elle cherche son prince charmant, son idéal, et attend une drague courtoise. Les hommes n’ont pas changé: ils veulent coucher, et se demander après si une romance est possible. La conséquence, c’est que les femmes s’enlèvent souvent des kilos et les hommes s’ajoutent des responsabilités professionnelles dans les profils…
N’y a-t-il pas un danger d’uniformisation des candidatures?
Dans une certaine mesure, puisque tout le monde se met en valeur dans son profil comme dans un CV. Par ailleurs, en rationalisant la quête, on évacue une part de hasard et d’espièglerie qui existe dans le monde réel. C’est la raison pour laquelle la plupart des internautes organisent rapidement un rendez-vous, pour juger sur pièce. Le plus important, c’est que l’internet permet pour la première fois d’apprendre à connaître quelqu’un de l’intérieur en premier, sans se baser d’abord sur l’apparence. C’est une immense révolution relationnelle, le nouvel âge de l’amour.
Comment voyez-vous l’évolution de cette pratique?
La croissance ne faiblit pas en Europe et les rencontres en ligne vont toucher d’autres catégories de population: l’internet est déjà le moyen le plus utilisé par les seniors pour faire des rencontres! On va par ailleurs assister, comme aux Etats-Unis, à une communautarisation du marché: des sites pour les juifs, les noirs, les protestants, etc. C’est une évolution logique, mais qui fait très peur à la France à cause de ses valeurs républicaines.
——-
Le Coeur Net, @mours et célibat sur le Web. De Pascal Lardellier. Ed. Belin.
——-
Lire notre dossier sur les rencontres en ligne.
Lire notre guide des sites de rencontre.