Dans l’histoire récente, de maladroits mensonges ont coûté leur carrière à un éminent ministre français et un président espagnol. Comparatif.
Il y a une dizaine d’années, Accoce et Rentchnick remportèrent un énorme succès de librairie avec leur livre «Ces malades qui nous gouvernent». Le sujet avait de quoi inquiéter après la succession de vieillards qui s’étaient succédé à la tête du Kremlin (et de son redoutable arsenal nucléaire) ou à la suite des révélations du médecin personnel de Mitterrand sur le cancer du président français dont les métastases se manifestèrent avant son accession au pouvoir.
Aujourd’hui, on pourrait se demander si ce n’est pas un livre consacré aux crétins qui nous gouvernent qu’il faudrait écrire pour obtenir un succès garanti. Je ne parle bien sûr pas de la Suisse. Et encore moins du Valais dont, si j’en crois le Grand Robert, le mot crétin [crétin, ine, n. – 1750, n. m.; du valaisan «crétin», var. de «chrétien», au sens de «innocent»] doit être la seule contribution à la langue française. Non, il va de soi que chez nous, pays d’exception choyé par les dieux, les politiciens conservent tous l’innocence de leurs premiers vagissements.
Mais ailleurs? Quelques cas ont frappé mon imagination ces derniers temps.
Le premier, c’est, l’an dernier, le comportement étrange de l’excellent José Maria Aznar, ancien président du gouvernement espagnol. Qui pourra jamais expliquer autrement que par un recours à la catégorie psychologico-culturelle du crétinisme son entêtement à nier l’évidence après le massacre de Madrid? Voilà un homme qui pouvait apparemment faire état d’un bon bilan de huit ans de pouvoir, qui, prévoyant, avait bétonné sa succession, qui pouvait en outre se flatter d’avoir tous les sondages en sa faveur. Et qui, soudain confronté une catastrophe d’ampleur plus que nationale, pense pouvoir l’instrumentaliser en fonction de rancunes vulgairement provinciales. Pis même, voyant qu’il s’embourbe en entraînant ses proches et son parti dans sa ruine, il s’entête, s’enferre, et s’encouble au point de chuter lourdement. Pauvre Aznar! Et pauvre aussi sa fille qui avait fait un si beau mariage!
Le deuxième, c’est celui d’Hervé Gaymard, ex-futur-premier ministre de Chirac, dont le bruit de la chute ne s’est pas encore tout à fait perdu dans les gorges de sa Savoie natale. Ce jeune homme de bonne famille (fils de cordonnier, disait-il) avait tout pour plaire, présentait bien, avait fait le mariage idoine avec une jeune femme brillante, d’une fécondité exemplaire et d’un catholicisme rigoureux. Il avait même entrepris une carrière éclair qui d’un vague strapontin ministériel il y a quelques années devait le conduire à la tête du ministère pour ses 45 ans. Un luxueux appartement loué avec une légèreté coupable (et peut-être un zeste d’avarice) aura suffi à désarçonner ce fringant cavalier de la chiraquie, l’envoyant proprement mordre la poussière. Comme le disait autrefois Perrette, tant va la cruche à l’eau…
Troisième cas et dernier cas enfin, c’est celui rapporté par Le Monde du 2 mars dernier. Il est encore plus affligeant que le cas Gaymard car si l’impétrant a près de 10 ans de moins que lui, il est déjà premier ministre. Il s’agit du social-démocrate Stanislas Gross âgé de 35 ans (!) dont la nomination à la tête du gouvernement tchèque en juillet 2004 coupa le souffle au pays. Puis, en quelques semaines, les Tchèques se divisèrent. Le petit peuple s’enthousiasma pour ce cheminot opportuniste qui parvint en quelques années à se hisser au faîte du pouvoir. Par contre intellectuels et patronat sont unis dans une même abomination d’un personnage qui, bien qu’à la tête d’un parti de gauche, demeure inclassable et politiquement indéfinissable.
Une telle ascension ne peut pas ne pas susciter de mesquines jalousies. Ces jours-ci la presse tchèque fait ses choux gras d’une affaire d’appartement que Stanislas Gross n’arrive pas à désamorcer. On lui demande d’expliquer comment il a fait pour acheter un appartement de 200’000 euros en 1999, alors qu’il ne gagnait que 1000 euros par mois. Au lieu de s’expliquer franchement, le jeune ambitieux multiplie des versions si abracadabrantes qu’il va finir par y laisser son crédit, son poste et… son gîte!
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