Poilues et rembourrées, les UGG australiennes se portent pourtant en toute saison. Exhibées par Madonna ou Cameron Diaz, ces chaussures bizarres sont au centre d’une dispute juridico-économique.
A première vue, on se dit que c’est une erreur. Difforme, sans caractère, sans recherche particulière, la botte UGG se présente comme une sorte de grosse moufle pour pied sensible. Et pourtant, elle est déjà la chouchou des femmes les plus branchées de la planète. En agneau retourné, on pourrait croire le modèle réservé aux frimas de l’hiver, mais selon «Glamour», «Elle» ou «Le Point», nous en serons toutes folles aussi cet été. A porter avec une mini-jupe, à même la peau…
La botte UGG a vu le jour en Australie. Elle est faite artisanalement en mouton doublé. C’est un peu la charentaise du pays des kangourous. Les surfeurs l’ont vite adoptée afin de réchauffer rapidement leurs pieds mis à rude épreuve dans les eaux glacées de l’Océan. Rien de très palpitant jusque là.
Mais l’année dernière, Madonna et Oprah Winfrey croisent son chemin et l’adoptent. Elles foulent alors les trottoirs de Hollywood et c’est la consécration. De ringarde, la botte UGG devient incontournable. Les stars se l’arrachent: Britney Spears, Cameron Diaz, Pamela Anderson, elles en ont toutes au moins une paire et l’exhibent avec fierté. En Europe, le démarrage est plus lent. «Nous importons la marque UGG depuis 8 ans, explique Corinne Lehmann de l’importateur DLD. Aucun magasin n’en a voulu jusqu’à cette année. En septembre, les bottes UGG seront disponibles dans toutes les villes du pays. C’est un immense succès.»
Dès 1996, Deckers Outdoor Corporation, groupe américain avait flairé la bonne affaire. Elle déposait le nom UGG et se préparait à faire un tabac en déclinant la botte agnelée en couleurs pastel. Dans le mille. Les stocks dans les boutiques fondent à vue d’oeil, tellement vite que bientôt il faut trois mois d’attente pour acquérir ses précieuses bottes. Elles s’arrachent sur les sites de vente aux enchères en ligne, atteignant même des prix astronomiques, près de 500 dollars la paire.
Face à cette concurrence américaine, les Australiens ripostent très vite. Les PME depuis toujours spécialisées dans la fabrication de ces bottes commercialisent à leur tour leur modèle à travers le Net. C’est le début du conflit. Deckers Outdoor Corporation ayant déposé la marque dans près de 25 pays, elle contraint les Australiens à retirer leur offre des sites de vente, leur interdit l’usage même du nom UGG. Les UGG australiennes pionnières du genre ne sont donc plus des… UGG. Ultime affront, Deckers Outdoor Corporation délocalise la production de la botte en Asie.
«Ces bottes sont un fleuron de la tradition australienne. Notre entreprise a été fondée il y a 45 ans par mon père, s’emporte Tony Mortel, un des fabricants australiens forcés de changer l’appellation de sa production. Cela défie l’imagination de savoir que cette marque passe ainsi en mains américaines. Pire encore qu’il nous soit interdit de l’utiliser ici, en Australie. Le mot UGG est un terme générique qui a toujours été utilisé chez nous. Il est même répertorié dans le dictionnaire!»
La botte UGG est désormais aussi à la mode dans les tribunaux. Tony Mortel et les autres fabricants en appellent à la mobilisation nationale en Australie. Un site de soutien à leur cause a été mis en place, dont l’adresse signifie «sauver notre symbole national».
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Les bottes UGG sont en vente sur www.uggaustralia.com ou dès septembre en Suisse dans les grands magasins de chaussures. Modèle short: 250 francs. Modèle classic tall: 300 francs.