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Les enfants aiment trop les euros

Après l’euro-compatibilité, voici l’euro-comestibilité: une étude scientifique vient de révéler ce phénomène pour le moins bizarre et dangereux.

On sait que chez les enfants en bas âge, l’exploration du monde passe bien souvent par l’absorption de pièces de monnaie. La plupart du temps, elles atteignent l’estomac sans encombre et continuent leur progression jusqu’au gros intestin. Plus rarement, la pièce reste coincée dans le fond de la gorge ou dans la trachée. Le bébé tousse violemment, devient tout rouge, suffoque. Il faut alors appeler les urgences (en Suisse, le 144) et accomplir sans tarder les gestes de premier secours (méthode de Mofenson ou manœuvre de Heimlich, selon l’âge de l’enfant).

La tentation d’avaler des pièces de monnaie dépendait-elle de la taille de celles-ci? Des chercheurs, curieux de pouvoir établir ou réfuter une telle corrélation, ont saisi l’introduction de l’euro et la mise en circulation, en Grèce, de pièces de 10 cent sensiblement plus petites que celles de 20 drachmes pour répondre à cette interrogation (voir l’illustration).

Ils ont récolté des données auprès de trois hôpitaux grecs et cinq danois (le Danemark a conservé sa monnaie). Tous les cas d’ingestion y ont été analysés et comptabilisés durant la période de janvier à mars 2002. Les résultats ont ensuite été comparés aux trois même mois des années 1996-2001.

Alors que pendant ces six années, la Grèce et le Danemark partageaient des résultats similaires, durant les trois premiers mois de 2002, l’incidence danoise n’a pas évoluée tandis que, côté grec, elle a connu une augmentation très significative, passant du simple ou double (voir la table comparative).

Une extrapolation permet d’évaluer à quelque huit cent cas, pour la Grèce, le nombre annuel d’étouffements provoqués par la nouvelle monnaie.

Au terme de leur publication, les scientifiques encouragent leurs confrères à poursuivre l’enquête: d’autres démarches permettront de mieux appréhender la relation entre le design des pièces et leur «comestibilité». Les chercheurs suggèrent aussi d’imiter les pays scandinaves qui percent leur petite monnaie pour prévenir précisément l’obstruction d’air en cas d’ingestion.

Les enfants ne sont d’ailleurs pas les seuls à ingérer des pièces de monnaie. Les personnes souffrant d’une maladie rare, la pica, se retrouvent eux aussi régulièrement au service des urgences pour faire évacuer les objets les plus divers qu’ils ont avalés. Ainsi ce patient qui avait ingéré un montant de 617 euros…

La pica, du mot latin «pie», par allusion à la voracité de cet oiseau, se caractérise par un goût morbide pour des substances non comestibles.

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Illustration originale d’Alexia de Burgos.
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