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La télé américaine découvre son homosexualité

La télé-réalité a aussi ses bons côtés. Depuis quelques semaines, elle joue un rôle très actif dans le processus de reconnaissance des homosexuels aux Etats-Unis. Deux nouvelles émissions à haute visibilité — mais sans la moindre prétention sociologique — proposent aux téléspectateurs d’examiner d’un peu plus près le mode de vie gay.

La plus spectaculaire des deux, «Queer Eye For The Straight Guy», vient de faire son apparition en prime-time sur le réseau NBC. L’idée est de lancer cinq garçons soignés à la rescousse d’un sixième qui n’a pas la chance d’être homosexuel. Ils prennent le pauvre homme en charge et révisent totalement sa coiffure, son look, ses habits et même son appartement, histoire de le rendre un peu plus séduisant.

Carson, le fashion-savant de l’émission, dispense ses conseils avec une autorité toute militaire: «Les boxers sont très hot. Et quand je dis boxers, je veux parler des garçons qui boxent. Et pas de tes sous-vêtements. Alors enlève-les!»

«Cette émission marque une étape importante dans la visibilité des gays et des lesbiennes, a déclaré l’activiste Scott Seomin, de la Gay and Lesbian Alliance Against Defamation (GLAAD). Ces cinq hommes ne représentent pas une menace. Ils ne s’excusent pas pour ce qu’ils sont et ils sont très, très sympathiques.»

Les téléspectateurs, en tout cas, semblent les trouver à leur goût. Entre le premier et le deuxième épisode, l’audience de «Queer Eye For The Straight Guy» est passée de 1,6 million (déjà un record) à 2,8 millions de spectateurs sur la petite chaîne Bravo.

Et quand le réseau NBC a rediffusé le premier épisode à l’intention du grand public le 24 juillet, ce sont 6,7 millions d’Américains qui ont suivi cette première opération de relookage au masculin. On n’avait jamais vu cela depuis le succès des Osbournes sur MTV. Les annonceurs, parmi lesquels L’Oréal, sont ravis.

C’est également Bravo, filiale de NBC, qui a produit «Boy Meets Boy», le premier jeu de drague intégralement gay. Enfin, pas intégralement puisque trois des quinze prétendants sont des hétéros placardisés. Autrement dit, ils font semblant d’être gay pour séduire le beau James et empocher le magot, alors que tous les autres participants sont d’authentiques homosexuels. Il s’agit donc, pour le spectateur, de deviner qui est gay et qui ne l’est pas.

Et c’est là tout le plaisir du jeu. Chacun y va de ses spéculations. «Ce type qui parle de l’importance d’être vulnérable? Gay. Celui qui se penche, avec ses longs cheveux bien coiffés? Complètement straight. Un autre type est chiropraticien: straight. On dirait que celui-là s’est épilé les sourcils: gay.» Et ainsi de suite. La chroniqueuse du magazine Salon s’amuse de ses propres stéréotypes. Elle révise son gaydar et s’aperçoit à quel point les codes sont aujourd’hui brouillés.

Sans autre prétention que le divertissement, ces deux émissions présentent seulement quelques images d’homosexuels normaux. Ni hystériques, ni malheureux, ni coincés. Il n’en faut souvent pas davantage pour aider les jeunes gays à s’assumer — et pour rassurer leurs parents.