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«Le covid a généré de nouveaux défis»

Le Café du Grütli fait partie des 44 établissements lausannois qui ont obtenu le label de «café historique». Rencontre avec sa gérante, Vanessa Jeanneret.

À 33 ans, cette jeune maman, titulaire d’un CFC de spécialiste en restauration, d’une formation de sommelière de l’École du vin de Changins, d’une patente et maître d’apprentissage, s’apprête à succéder à ses parents à la tête du Grütli et à moderniser l’établissement fondé en 1849.

Comment voyez-vous le dynamisme gastronomique lausannois actuel ? 

Ces dernières années, les endroits branchés, parfois végétariens ou véganes, attirant un public jeune et misant beaucoup, voire tout, sur les ventes à emporter ou en livraison, fleurissent. Lausanne offre une étonnante diversité et modernité pour sa taille. C’est bien ! D’un autre côté, il y a un vrai besoin chez beaucoup de revenir aux sources d’un terroir dépoussiéré. Le covid a généré de nouveaux défis dans la branche. Recruter et conserver du personnel qualifié est devenu difficile. Je le vois bien en tant que membre du comité de GastroLausanne. Heureusement, les affaires vont bien et cet été a marqué un retour à la normale côté affluence.

De quoi êtes-vous chargée au Café du Grütli ?

De tout (rires). Notamment gérer nos 12 employés, dont quatre à six sont en cuisine pour concocter nos plats à la minute, et mettre sur pied une carte des vins très fournie qui étonne bien des clients. Nous privilégions les bons produits de notre région et de saison et apprécions donc de pouvoir les

proposer à nos clients avec le moins d’intermédiaires possible. Nous prenons plaisir à faire découvrir des petits producteurs locaux. Les mercredis et samedis, nous avons la chance, vu notre emplacement à la Palud, de pouvoir faire le marché et d’être en contact direct avec nos fournisseurs. Notre chasse nous vient des Grisons. Elle est fournie par mon oncle qui prend chaque année des vacances exprès. En reprenant le Grütli, j’ai envie d’apporter du peps, mais sans tout chambouler non plus. Les trois télécabines, installées devant notre restaurant chaque année depuis les Jeux olympiques de la jeunesse d’hiver de 2020 dans lesquelles on peut déguster une fondue à quatre, illustrent cette évolution en douceur.

Comment êtes-vous devenue restauratrice ?

J’ai toujours dit que jamais, je ne ferais ce métier (rires) ! Gamine, j’avais l’impression que le restaurant me volait mes parents. Ma sœur aînée et moi y mangions souvent sous la supervision de nos grands-parents. L’odeur des mets au fromage, mais aussi à l’époque du tabac froid, m’a marquée à jamais. Finalement, après le gymnase, j’y suis venue moi aussi. Peut-être ai-je voulu rattraper le temps perdu car je travaille désormais avec mes parents ?

SES ADRESSES

Le 57° (Place du Port, Lausanne): «Ce grill-rôtisserie, situé dans le Château d’Ouchy, est l’un des meilleurs endroits où déguster d’excellentes viandes rouges ou blanches en ville.»

Le café de la Poste (Grand-Rue 48, Lutry): «J’aime y décompresser le dimanche après une semaine de travail. Les filets de perches du Léman y sont délicieux surtout quand on les déguste sur une magnifique terrasse les pieds dans l’eau !»

Ume (Route de Berne 285, Épalinges): «Ce restaurant asiatique ne paie pas de mine. Pourtant, on y trouve des sushis incroyables. J’y vais régulièrement. Ça change agréablement des produits traditionnels du Grütli.»

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Ces cafés lausannois avec une âme et une histoire

Elles étaient là avant nous et le seront après : des enseignes chargées d’histoire, ayant régalé des générations de clients. Lausanne ne compte pas moins de 44 établissements de ce genre, dont le Grütli, la Brasserie Bavaria ou le Café Romand et son célèbre papet vaudois. Depuis 2021, la Ville leur attribue le label de « café historique ». Pour l’obtenir, deux critères ont été pris en compte : l’ancienneté (plus de cinquante ans) du lieu et l’authenticité de ses décors. Cela encourage les tenanciers à chérir l’âme de ces lieux et à les faire vivre au présent. Leur histoire est racontée dans le livre Cafés et restaurants historiques de Lausanne, paru chez Favre en mai 2022. On y apprend que la Pinte Besson de la rue de l’Ale, réputée pour sa fondue, a près de 250 ans. Qu’avant d’embellir les Bois de Sauvabelin, le Chalet Suisse servait ses délicieux mets aux fromages helvétiques dans le cadre de l’Expo universelle de 1958 à Bruxelles. Ou que le restaurant Au Chat Noir, ouvert en 1897, a été nommé ainsi en l’honneur de son « grand frère », le célèbre Chat Noir de Montmartre. C’est d’ailleurs à l’artiste lausannois Théophile Alexandre Steinlen, disparu il y a un siècle, en 1923, que l’on doit la célèbre illustration du bistrot parisien ainsi que le logo du Chat Noir de Lausanne.

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Une version de cet article réalisé par Large Network est parue dans The Lausanner (n° 10).