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Des cicatrices pour la liberté

En 2020, la Biélorussie vit son plus grand soulèvement populaire contre le régime de Loukachenko. Dans son ouvrage The Scars, le photographe Jędrzej Nowicki témoigne des traumatismes engendrés par sa violente répression.

Une version de cet article réalisé par Large Network est parue dans le magazine photographique Météore.

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Des hématomes, des fractures, des points de suture. Et autant de blessures qui se lisent dans les regards, de marques à l’âme invisibles et pourtant indélébiles. C’est au travers de ces cicatrices que Jędrzej Nowicki a choisi de rendre compte des violences infligées aux manifestants biélorusses qui dénonçaient, en août 2020, la réélection avec 80% des voix d’Alexandre Loukachenko, au pouvoir depuis 1994.

Alors envoyé à Minsk afin de couvrir l’élection pour la Gazeta Wyborcza, le jeune photographe polonais décide de rester plus longtemps sur place pour documenter les suites de cette répression qui a fait deux morts, de nombreux blessés, qui a donné lieu à plus de 6700 arrestations et qui a, comme le rapporte Amnesty International, transformé les prisons en lieux de torture. «Le combat du peuple biélorusse pour sa liberté me fait penser à celui mené dans mon pays avant ma naissance, explique Jędrzej Nowicki. Mes parents sont journalistes et mon père était un dissident communiste. Cette lutte était omniprésente dans leur vie et cela a eu un grand impact sur moi. Ce qui caractérise mes différents reportages, c’est justement cet éternel besoin humain de vivre libre et dans la dignité.»

Lauréat des prix Luis Valtueña et World. Report, The Scars met notamment en lumière l’histoire de Siergiey, dont la balafre au front témoigne de la force des coups reçus, Alexander, régulièrement battu durant sa captivité à Okrestina, et Daria, libérée du même centre de détention après cinq jours d’enfer. «Les gardiens l’avaient surnommée Rose à cause de la couleur de sa veste. Elle aussi m’a parlé des violences commises dans le centre», confie le photographe. Faire entendre la voix de personnes «prises au piège d’un monde très sombre», c’est ce qui motive son travail au quotidien. En mars 2022, Jędrzej Nowicki a parcouru l’Ukraine avec le même objectif. Il y est retourné en mai.

Question directe : Vos photos permettent-elles de voir la guerre ?

Jędrzej Nowicki : «Oui, mais à travers ses conséquences. Je ne cherche pas à photographier les conflits en eux-mêmes, les soldats qui se battent, les opérations militaires, les forces spéciales qui tabassent des gens. Je m’intéresse surtout à ce qui reste après, à l’impact qu’ont ces conflits sur les individus et les sociétés.»

JĘDRZEJ NOWICKI, POLOGNE

Autodidacte, Jędrzej Nowicki, né en 1995 à Poznań en Pologne, passe neuf ans à la Gazeta Wyborcza, le plus grand quotidien polonais. En 2019, il gagne la bourse d’études Ian Parry. En 2021, il se lance comme free-lance. Il a déjà été publié dans Le Monde, Die Zeit, The Guardian et The Wall Street Journal.

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