En cinq ans, Fashion TV a imposé sa présence dans tous les grands défilés de la planète. La puissance de sa diffusion l’a rendue indispensable aux professionnels et aux passionnés, les «fashionista» comme on dit dans le milieu.
Basée à Paris, Fashion TV diffuse dans plus de 130 pays des successions ininterrompues de catwalks, alternant sans commentaires haute couture, lingerie et prêt-à-porter, masculins ou féminins, sur une musique électronique ambient devenue sa marque de fabrique.
Cette semaine, Fashion TV annonce l’ouverture de sa représentation en Suisse par l’intermédiaire de la société de production genevoise PointProd. A cette occasion, la chaîne organise une fête très sélect dont le Tout-Genève bruisse depuis des semaines.
En Suisse pourtant, les programmes de Fashion TV sont mal distribués. Outre Zurich, ses programmes ne sont diffusés qu’à Genève sur le couteux service Digicable qui ne séduit que quelques milliers d’abonnés. Depuis quelques jours, elle est aussi transmise à Lausanne, mais uniquement en phase de test sur le le service numérique payant DigiTV. La chaîne espère étendre cette couverture grâce à sa nouvelle représentation locale, mais surtout diffuser les grands événements de la mode suisse.
Un accord a été signé avec le défilé Plateform de Genève en attendant de conclure avec les autres rendez-vous que sont l’Extravaganza de Berne, le Bolero de Zurich et le Gwand de Lucerne.
«L’arrivée de Fashion TV en Suisse est une bonne nouvelle, dit Stéphane Bonvin, journaliste mode pour Le Temps et le magazine Edelweiss. En diffusant des extraits de défilés locaux, la chaîne fera connaître les créateurs suisses.»
Malgré une croissance continue, l’entreprise Fashion TV a toujours voulu limiter ses coûts. Elle emploie une cinquantaine de personnes dans le monde, dont une vingtaine au siège à Paris. «Nous vivons essentiellement des redevances que nous versent les diffuseurs de bouquets satellites et les câblo-opérateurs pour retransmettre le signal», explique Xavier Leclerc, directeur général adjoint.
La chaîne est véhiculée par l’intermédiaire de 29 satellites qui couvrent cinq continents. «La location des faisceaux pour la distribution représente l’essentiel de nos coûts, poursuit-il. Le contenu n’est pas cher à produire, puisque ce ne sont que des retransmissions de défilés. Nous ne faisons pas de direct, pour limiter les frais, sauf pour le Carnaval de Rio dont nous avons l’exclusivité des droits hors du Brésil sur le câble et le satellite.»
Forte de sa diffusion planétaire, la chaîne peut désormais suivre un modèle économique atypique en faisant payer la diffusion de certains défilés. Ainsi, en Suisse, le Plateform paiera 240 dollars (380 francs) par minute de retransmission.
«Les sponsors de Plateform, qui seront visibles à l’écran, pourront aussi bénéficier de cette notoriété planétaire», précise Xavier Leclerc. La publicité traditionnelle, qui existe aussi sur Fashion TV, est vendue dix fois plus cher, soit 2400 dollars la minute.
«Nous devons respecter les lois internationales et exclure le tabac et l’alcool. Par ailleurs, nous n’acceptons pas tous les produits pour préserver l’environnement haut de gamme de la chaîne, donc pas de couches-culottes!»
Fashion TV surfe sans complexe sur le prétexte couture pour présenter du contenu sexy aguicheur et doper ainsi son audience mondiale. Personne ne s’étonnera que les défilés de lingerie bénéficient du plus haut taux d’audience, et pas seulement sur le site web de la chaîne.
«Pour des raisons évidentes, nous ne sommes pas diffusés dans les pays du Golfe comme l’Arabie Saoudite ou le Koweït. En Inde, une polémique a été soulevée après notre arrivée, mais les mœurs évoluent, et nous voyons de moins en moins de réactions, y compris dans les pays conservateurs.» Des programmes adaptés aux «particularités culturelles» sont cependant transmis sur les satellites qui couvrent l’Asie, la Turquie et l’Amérique latine.
Sur le modèle suisse, Fashion TV a déjà ouvert des bureaux dans la plupart des pays arrosés, afin de multiplier les sources de revenus et diversifier les programmes. «Nous voulons ainsi faire découvrir les spécificités locales, explique encore Xavier Leclerc. Les fashionista ne veulent pas voir que du Gucci ou du Saint Laurent.»
Pour capitaliser sur sa marque, Fashion TV a lancé par ailleurs une chaîne de cafés franchisés. Il en existe déjà à Paris, Moscou ou Johannesburg. L’entreprise travaille actuellement sur une meilleure diffusion aux Etats-Unis encore mal couverts et mise sur un développement en ligne en diffusant son contenu sur les réseaux broadband.
Lancée par deux Français aux profils complémentaires, Michel Adam (qui a fait fortune dans le textile) et François Thiellet (créateur de la chaîne musicale MCM), Fashion TV atteindra «prochainement» l’équilibre financier.
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Fashion party genevoise
«Tu y seras toi, à la soirée Fashion TV?» La fête privée organisée par la chaîne de la mode excite autant les milieux branchés que la jet-set genevoise depuis des semaines. Pour les rassembler, Fashion TV a mis une dose d’électro dans son cocktail, avec le lancement de sa dernière compilation Lounge Music (l’un des nouveaux champs d’activité de l’entreprise).
Quelques célébrités de circonstance seront sur place: des «membres de la famille royale d’Italie, de Yougoslavie et d’Espagne» ainsi qu’«Emmanuel de Brantes et d’autres personnalités du monde du spectacle comme Amanda Lear et David Hallyday», s’enthousiasme le flyer.
Organisée le jeudi 19 septembre au Bypass, un nouveau club dans le quartier des Acacias, la soirée s’annonce sauvage: «FashionTV est connue pour ses fêtes déjantées dans le monde entier, avec champagne et filles superbes, assure la responsable des relations publiques, Maja Bijlenga. Nous nous réjouissons de faire découvrir cette culture à Genève.» Les intéressés enchaînent généralement avec la question: «Je m’habille comment?»
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Une version de cet article de Largeur.com a été publiée le 15 septembre 2002 dans l’hebdomadaire Dimanche.ch.