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Vous avez dit hors de contrôle?

Qui donc se montre «prudent et craintif», flairant «précautionneusement les environs avant de rebrousser chemin»? Quel être mystérieux évoque-t-on, comme à voix basse, avec des phrases d’une prudence de chasseur sioux, du genre: «Aujourd’hui, on ne sait pas où il est, ni d’où il vient.» Non sans subodorer que, pouvant «parcourir jusqu’à 60 kilomètres par nuit, il est peut-être déjà loin». Oui, quelle est cette chose qui, «si on arrive à faire parler son ADN» pourrait être rapprochée «d’un groupe déjà connu»?

Bienheureusement il ne s’agit pas d’un énième variant du virus, mille fois plus contagieux que le précédent, comme tout variant qui se respecte. Aurait-on d’ailleurs imaginé, il y a encore peu de temps, qu’un vocable aussi neutre, aussi plat que «variant» puisse désormais désigner, avec certes l’aide de l’épithète beaucoup plus agressive «d’anglais», une réalité aussi effrayante?

On ne veut pas non plus parler d’un gouvernement appelé Conseil fédéral, habité depuis bientôt une année d’une obsession unique -partagée certes par la plupart de ses alter egos à travers le monde-: ne pas «perdre le contrôle de l’épidémie».

Et ce même si on ne sait pas vraiment ce que ce peut signifier cette perte de contrôle maintes fois évoquée, personne ne pouvant vraiment dire où se situe la limite entre le contrôle et sa perte. Sauf peut-être, en évoquant de manière étriquée le jour où 100% des quelques mille lits de réanimation disponibles en Suisse seront occupés uniquement par des patients atteints du seul Covid. Notons pour l’histoire que le 27 janvier de cette année 2021, 85 nouvelles hospitalisations de ce type ont été recensées dans tout le pays.

Cette bête qui bat la campagne, ce n’est pas non plus le citoyen lambda confronté aux directives quotidiennement modifiées, remodelées et contredites de ce même gouvernement appelé Conseil fédéral. Dernier rebondissement en date: la volonté de tester massivement et préventivement dans les EMS, les écoles et les garderies. Dans quel but? On vous le donne en mille: éviter que l’épidémie, dopée par les variants, ne soit «à nouveau hors de contrôle». Notons ce «à nouveau», même s’il est difficile de se rappeler quel jour déjà l’épidémie a été hors de contrôle.

Ce même citoyen lambda est prié de bien prendre note d’une autre mesure toute fraîche du jour: la possibilité de raccourcir sa quarantaine. Mais attention seulement en cas de test PCR négatif et seulement à partir du septième jour. Que le chanceux libéré après sept jours au lieu des dix réglementaires n’aille pourtant pas imaginer qu’il puisse dès lors tranquillement batifoler à sa guise. Il lui faudra en effet continuer, jusqu’au 10ème jour, à porter un masque dès qu’il sort de chez lui et à se tenir à distance réglementaire de tout un chacun. Cela tombe d’ailleurs bien: parmi les nouvelles mesures figure également le retour des amendes d’ordre pour infraction au règlement sanitaire.

Comme par effet de contraste, ce même gouvernement appelé Conseil fédéral se gargarise d’une nouvelle aide de 5 milliards apportée à l’économie. Ce qui ressemble à un généreux cadeau pourrait pourtant être aussi considéré comme un dû, un minimum, selon le principe du «qui casse, paye». Lorsque 100’000 entreprises, commerces, restaurants, voyagistes, hôtels, acteurs du tourisme  et autres subissent un recul majeur de leur chiffre d’affaires, jusqu’à risquer la faillite, ce n’est pas strictement à cause de l’épidémie. Mais plutôt en raison des mesures, comme celle de l’interdiction de travailler, prises par le gouvernement appelé Conseil fédéral pour que cette épidémie ne soit pas -devinez quoi- «hors de contrôle». Avec pour l’instant comme principal résultat une crise économique qui se profile et pourrait bien, elle, réellement se retrouver hors de contrôle.

Non, la créature traquée évoquée ci-dessus appartient en réalité au chapitre devenu fort ténu des bonnes nouvelles: le retour du loup à Genève après 150 ans d’absence. Oui, une bonne nouvelle, même pour les anti-loups, même pour les éleveurs. L’insaisissable canidé ne vient-il pas nous rappeler, comme une bouffée d’air pur, l’innocente actualité et les gentils problèmes du monde d’avant?