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«J’ai eu ma première panne», par Jean, 25 ans

Il y avait longtemps que je l’avais repérée, cette Karine, une petite brune du marketing qui me faisait un effet fou avec sa douce impertinence, son regard angélique et ses tailleurs toujours un poil trop courts. Le week-end passé, je me suis finalement lancé, qui ne tente rien n’a rien, et je l’ai invitée pour un dîner en tête à tête.

La belle a accepté avec un grand sourire, presque complice. Excellentes conditions pour un premier rendez-vous, me disais-je en amorçant un plan romance-restaurant qui semblait correspondre à cette wonderwomen convoitée par tous mes collègues.

Le dîner n’aurait pas pu mieux se passer. Ma prestation (puisque c’est bien de cela qu’il s’agit lors d’un premier rendez-vous) faisait grand effet: Karine souriait, riait même souvent, et m’accrochait de son regard en coin. Bien avant le dessert, je m’imaginais déjà en deuxième partie de soirée, lui retirant sa blouse et son petit pantalon moulant… Les images de son corps nu sous le mien commençaient d’ailleurs à m’envahir.

On a enchaîné dans un bar et, quelques cocktails plus tard, la belle ne m’a pas repoussé quand j’ai penché ma tête vers son sourire. Ne restait qu’à suggérer un dernier verre dans mes appartements, ce qu’elle a rapidement accepté, après une courte hésitation d’usage.

Dans cette course d’obstacles que représente la séduction d’une femme longtemps convoitée, j’avais ainsi réussi la première épreuve. Ne restait qu’à «passer à l’acte».

Il n’y a pas si longtemps, c’était pour moi la part la plus plaisante et la plus facile de l’exercice. A l’exception des difficultés de jeune puceau rencontrées lors de mes premiers rapports, je n’avais jamais eu de problème de panne. C’était même plutôt l’inverse: j’avais de la peine à calmer mes ardeurs.

Ce soir-là, mon univers s’est effondré. Tendrement, Karine m’a suivi chez moi. J’ai allumé une bougie et, comme prévu, j’ai glissé lentement mes mains sous sa blouse en retirant avec assurance ses chaussures et son petit pantalon.

Mais malgré sa peau douce et blanche, l’arrogance de ses petits seins de 24 ans, l’attente et le désir accumulé toute la soirée, je devais constater l’horreur: la panne.

Comme sous une douche glaciale, j’ai réalisé brutalement l’angoisse des milliards d’hommes qui m’avaient précédé dans ce calvaire. Moi qui riais du Viagra, j’en étais au même point que ces vieux impuissants: je voulais à tout prix réveiller la bête qui semblait défaillir sans raison, à quelques pouces d’un objectif âprement convoité.

Mine de rien, j’ai tenté de prolonger les préliminaires en espérant que la machine se remette tranquillement en route. Mais rien n’y faisait, pas même les caresses les plus subtiles de la belle Karine, l’érotisation intellectuelle maximale ou les baisers intimes qui m’excitent tant habituellement.

J’avais bien du mal à cacher cette catastrophe et Karine n’avait plus qu’à s’en apercevoir. «Qu’est-ce qui se passe, je ne te plais pas?», a-t-elle susurré. Je savais bien qu’elle n’en doutait pas une seconde. Elle me plaisait bien trop, et c’était peut-être justement ça qui avait cassé mon jouet.

La nuit qui a suivi me laissera le pire souvenir de ma vie. J’avais complètement perdu le contrôle de cet organe central. Mon sexe semblait me narguer: au lieu d’une panne complète et définitive, il se réveillait par moments, sans prévenir. Ragaillardi, je me disais à chaque fois que je n’avais plus qu’à foncer. Mais mes facultés ne revenaient pas: il suffisait que je me tourne, que je regarde ailleurs ou que la belle change d’un millimètre sa position, et l’édifice retombait en un instant.

Après des heures de palabres humiliantes, j’ai fini par abandonner, résigné devant cet organe impuissant. Sans trouver le sommeil, je cherchais des explications. Avais-je regardé trop de films X en m’autostimulant? Etais-je devenu blasé? Etait-ce la fatigue, l’alcool? Aucune piste ne semblait convaincante.

Mon problème m’obsède. Quatre jours plus tard, je ne sais toujours pas si mes facultés sont complètement revenues et surtout, je suis toujours sans nouvelles de Karine, sans doute aussi gênée que moi de reprendre contact. Et ses mots, envoyés comme une boutade censée détendre l’atmosphère dans la nuit, me trottent encore dans la tête: «Un Viagra matin, midi et soir, et tout ira mieux.»