Le dernier gadget de la firme japonaise a été commercialisé mardi via internet: 3000 exemplaires vendus en vingt minutes. Cet animal artificiel bouge tout seul et répond à son maître. Marco Kalmann est troublé.
Je n’ai jamais eu de chien. La seule idée d’une petite créature qui habiterait chez moi suffit à m’effrayer. Je ne me sens pas suffisamment responsable pour prendre en charge l’existence d’un animal domestique.
Il y a quelques semaines, j’ai appris que Sony s’apprétait à commercialiser un chien-robot, une sorte de tamagotchi à quatre pattes. Cette nouvelle m’a intrigué. Je me suis intéressé à la chose, qui mesure 27 centimètres et qui bouge toute seule. Un animal pour moi, enfin?

Le chien-robot de Sony s’appelle Aibo, ce qui signifie «partenaire» en japonais. Les deux premières lettres de son nom font référence à «artificial intelligence». Ses mouvements sont programmés selon cinq critères: l’affection pour son maître, la curiosité, l’envie de bouger et le besoin de recharger ses batteries.
Par ses mouvement, Aibo est capable de simuler la joie, la tristesse, la colère, la surprise, la peur et le dégoût. Il peut, par exemple, bouder si son maître le gronde. J’avais envie d’essayer.
Je viens d’apprendre, hélas, que ce chien-robot est déjà en rupture de stock, le jour même de sa mise sur marché. Vendus exclusivement par commerce électronique, les 3000 exemplaires ont été écoulés en vingt minutes ce matin au Japon, au prix extravagant de 2000 dollars la pièce.
Dans son communiqué, Sony précise qu’un autre lot de 2000 chiens-robots a été mis en vente aujourd’hui aux Etats-Unis. A l’heure où vous lirez ces lignes, ils seront sans doute tous vendus.
Que faut-il en conclure? Qu’il s’agit d’un formidable succès? N’exagérons rien. Compte tenu du vacarme publicitaire orchestré autour de l’animal et des petites quantités commercialisées, il est tout à fait normal que Sony ait écoulé ses 5000 chiens-robots en une seule journée.
La principale leçon à retenir de l’affaire, c’est l’habileté avec laquelle Sony a réussi à créer l’événement. Même s’il était vendu à perte, Aibo constituerait une opération rentable pour la firme japonaise. Les répercussions médiatiques sont immenses. Tout le monde parle du chien-robot, même moi.
L’animal artificiel répond évidemment à un fantasme millénaire, celui d’une créature synthétique et autonome capable d’interagir avec l’homme. Les poupées qui parlent, les tamagotchi et les furbies n’en était que l’esquisse. Le chien Aibo préfigure le jouet des années 00.
J’entends déjà les râleurs qui crieront à la décadence du monde occidental. Les hommes finiront-ils par préférer les gadgets aux créatures du Seigneur? Pas si sûr. L’avènement du chien-robot annonce peut-être une pacification des rapports entre humains et vrais animaux.
Je soupçonne mon voisin d’avoir abandonné sa chienne Brilla au bord d’une route, l’été dernier. Il la considérait comme un animal-objet sans valeur et jetable. Plutôt qu’un chien vivant, je préfère acquérir un animal que je peux éteindre quand je pars en vacances.
