Christoph Blocher au gouvernement suisse? Il n’y a pas si longtemps, l’idée aurait paru parfaitement incongrue. Entrepreneur multimillionnaire et habile tribun, l’homme est considéré comme un politicien démagogue et peu fréquentable. On le croyait destiné à mener sa carrière politique dans l’opposition.
Son parti, l’Union démocratique du centre (UDC), dont il dirige la section zurichoise, s’est notamment distingué par des campagnes musclées contre le droit d’asile.
Jusqu’ici, le conseiller national Christoph Blocher s’était surtout illustré par son opposition systématique à toute mesure d’ouverture. Mais son image évolue.
Dans les milieux économiques zurichois, il n’est plus inavouable de soutenir les options politiques du patron du groupe EMS-Chemie.
En observateur attentif de la scène politique suisse, Klaus J. Stöhlker relève que Blocher joue maintenant un rôle dans tous les enjeux nationaux. Interview.
Largeur.com: Quel est selon vous l’avenir politique de Christoph Blocher?
Klaus J. Stöhlker: Je le vois parfaitement au Conseil fédéral. C’est une hypothèse que l’on ne peut pas exclure, si les partis gouvernementaux du centre-droit (le parti radical et le parti démocrate-chrétien) n’arrivent pas à résoudre la crise qu’ils traversent dans un délai de trois à sept ans. Actuellement, Blocher est certainement le politicien suisse le plus fort. Il gagne chaque année en respect et il représente le succès économique, grâce aux bons résultats de son entreprise, EMS-Chemie.
Largeur.com: Dans votre scénario, qu’advient-il de la formule magique qui régit le gouvernement (deux radicaux, deux PDC, deux socialistes et un UDC)?
Klaus J. Stöhlker: Nous allons vers une formule magique à géométrie variable. La répartition des sièges au Conseil fédéral devra certainement être modifiée si l’UDC devait peser plus lourd que le parti radical ou le PDC au Parlement. Les élections fédérales du 25 octobre seront déterminantes.
Largeur.com: L’UDC de Christoph Blocher se comporte comme un parti d’opposition et non comme un parti gouvernemental. On imagine mal ce courant représenté au Conseil fédéral…
Klaus J. Stöhlker: Un parti débute toujours par l’opposition. Il y a 20 ans, Blocher a commencé à reconstruire l’UDC. Aujourd’hui, il en a fait un parti nationaliste-bourgeois-conservateur, une sorte de deuxième parti radical. Il n’y a pas que Blocher à l’UDC. Il est entouré d’une équipe intelligente et très active. La bataille entre les partis de droite promet d’être dure.
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Klaus J. Stöhlker est conseiller en communication spécialisé dans questions politiques. Toujours très sollicité par les médias alémaniques, il a travaillé pour le parti radical jusqu’en 1995. Installé sur les bords du lac de Zurich, il a soigné l’image des conseillers fédéraux Kaspar Villiger et Elisabeth Kopp. L’UDC ne figure pas parmi ses clients.