TECHNOPHILE

Une télé plus belle pour des programmes sur mesure

La télévision numérique promet des merveilles: la transmission de programmes en haute définition, la multiplication du nombre de chaînes et surtout, les émissions à la demande

En un demi siècle d’existence, la télévision n’a pas beaucoup changé. Certes, les images se sont colorées et ont gagné en stabilité, le son est passé au stéréo et l’offre (le nombre de chaînes) s’est étoffée grâce au câble et au satellite. Mais, à terme, la télévision numérique promet un saut d’une ampleur bien plus importante.

Pourquoi le numérique?

La transmission numérique pour la télévision – ce qu’on appelle le DVB, Digital Video Broadcast – consiste à coder les données (images, sons) informatiquement et à les envoyer après compression. A l’arrivée, une puce informatique – située dans le téléviseur ou dans un boîtier externe – décode les signaux. La compression permet d’envoyer beaucoup plus d’informations à travers la même infrastructure, que ce soit par transmission herzienne, par le câble ou via satellite. Un seul canal analogique traditionnel peut véhiculer l’équivalent de six à dix chaînes numériques à qualité égale. Au lieu d’augmenter le nombre de chaînes, on peut aussi utiliser le numérique pour améliorer considérablement la qualité des images.

Des images plus grandes

Aux Etats-Unis, plusieurs chaînes de cinéma diffusent déjà leurs programmes en numérique de haute qualité. Cette technologie permet à un téléviseur adéquat d’afficher une image de 1080 lignes, soit le double d’un appareil actuel, en grand format 16:9 (au lieu 4:3). On parle alors de HDTV (High Definition TV). Le son y gagne généralement aussi avec une qualité CD et parfois le système surround. Les appareils HDTV se divisent en plusieurs catégories: l’entrée de gamme, ce sont les appareils à tube (vendus entre à partir de 2500 francs suisses, soit 10’000 francs français). On trouve ensuite des écrans rétroéclairés puis les écrans à plasma ultraplats dans le haut de la gamme (pour 15’000 à 25’000 francs suisses, jusqu’à 100’000 francs français). En Europe, la HDTV ne s’est pas encore imposée. Les grands groupes asiatiques, comme Hitachi, Toshiba, Panasonic ou Samsung investissent à fond pour s’emparer de ce nouveau marché et les prix devraient baisser rapidement.

Le numérique bientôt partout

En Europe, diversité linguistique oblige, on préfère utiliser la technologie numérique pour multiplier le nombre de chaînes au lieu d’améliorer la qualité des images. En France, où les téléréseaux sont rares, la transmission numérique s’est imposée pour les bouquets de programmes par satellite (CanalSatellite et TPS). Un simple décodeur bon marché (environ 500 francs suisses, 2000 francs français) branché sur une parabole permet de recevoir une quantité de chaînes payantes ou gratuites.

En Suisse romande, le numérique fait ses premiers pas sur le câble. A Genève, le système Digicable est commercialisé depuis quelques mois directement par TéléGenève. Digicable propose pour l’instant une dizaine de bouquets linguistiques payants, une soixantaine de radios en qualité CD, et compte 4500 abonnés. En dehors de Genève, les téléréseaux romands se sont regroupés dans un consortium baptisé DigiTV, dont Cablecom – racheté par l’anglais NTL – est l’un des principaux actionnaires.

Par ailleurs, le vieux rateau n’est pas mort: une nouvelle vie s’annonce pour les vieilles antennes qui ornent les toits. La transmission numérique hertzienne permet d’augmenter considérablement l’offre dans les villes. La plupart des pays européens ont imposé aux diffuseurs nationaux une transition vers le numérique par les ondes, ce qui permet une multiplication rapide des chaînes. En France, 6 bouquets de 5 à 6 programmes seront testés l’an prochain, puis proposés sur l’ensemble du territoire dès la fin 2001, ce qui promet de changer considérablement le paysage audiovisuel (80% des foyers français recoivent la télé au moyen d’une simple antenne). Les nouveaux téléviseurs seront vendus directement équipés d’un décodeur numérique.

«En Suisse, nous n’avons pas considéré le numérique terrestre comme une priorité, explique Marcel Regnotto, responsable média et réseaux câblés auprès de l’Office fédéral de la communication (Ofcom). Seuls 15% à 20% des téléviseurs installés fonctionnent au moyen d’une antenne. De plus, le terrain accidenté du pays pose des problèmes techniques. Nous y viendront cependant, d’ici à 2005, lors de la conférence internationale sur le sujet organisée par l’Union internationale des télécoms.»

Du sur mesure pour un téléspectateur actif

Plus tard, la migration vers le numérique changera le fonctionnement de la télévision, pour la rendre plus interactive. L’augmentation des débits de transmission permettra aux téléspectateurs de choisir des programmes sur mesure. Il sera possible de sélectionner des bouquets thématiques payants qui correspondent à ses goûts, ce qui va faire exploser le nombre de chaînes spécialisées dans le sport, l’actualité locale, l’éducation, les films, etc. Par ailleurs, la transmission de programmes sur demande (films, émissions, téléjournal) sera aussi possible, ce qui annonce la mort lente du vidéo club et du magnétoscope, comme l’explique ici Craig Birkmaier, spécialiste américain de la télévision numérique.