«Nous avons disposé des panneaux avec des conseils de drague tout le long du parcours de l’arbalète, qui fait à peu près dix minutes, soit un temps comparable à celui d’un speed dating.» Dominik Honegger, directeur des remontées mécaniques d’Elsigenalp, est fier de son coup. La petite station de l’Oberland bernois compte s’imposer comme le «hub régional» du flirt à skis. Pour cela, elle consacre désormais deux de ses installations aux rencontres.
Baptisées «Sie Er Lifte» (pour «Arbalète Elle Lui»), ces remontées mécaniques permettent depuis décembre aux célibataires de «joindre l’utile à l’agréable», autrement dit de se hisser en haut des pistes tout en engageant une conversation galante. «Nous les aidons à briser la glace», poursuit le directeur. Le concept permet de faciliter les échanges et d’éviter les silences gênés qui surviennent souvent entre skieurs concentrés sur leurs bâtons.
Une véritable révolution pour cette station qui visait à l’origine un public plutôt familial. Il faut dire que le responsable sait de quoi il parle, lui qui a rencontré sa propre femme sur une piste de ski: «La drague sur les pistes est une très vieille tradition que nous tentons de faire redécouvrir. L’avantage, dans notre petite station, c’est qu’on utilise la plupart des installations à deux, et pas à quatre ou six skieurs. Ainsi, on peut s’entretenir en toute discrétion, pour commencer à tisser des liens.»
A l’arrivée, afin de prolonger tranquillement la conversation, de toutes nouvelles chaises longues particulièrement confortables attendent les célibataires qui viennent de faire connaissance. La station va même plus loin: au Berghaus d’Elsigenalp, on propose cinq chambres doubles que l’on peut louer à l’heure, pour ceux qui ne veulent pas attendre un retour en plaine pour conclure.
Pas du goût de tous
«Cette initiative nourrit aujourd’hui les discussions dans la station. Mais elle permettra de rendre notre domaine plus populaire», estime Andreas Schmidt, surveillant des pistes. Bilan de l’opération? Par beau temps, la station répertorie jusqu’à 10’000 parcours quotidiens — même s’il reste difficile de distinguer les utilisateurs traditionnels des célibataires.
Certains collaborateurs plus âgés se sont montrés assez sceptiques sur cette opération, avoue Dominik Honegger. «Mais généralement, la réaction est positive. Et le personnel engage aussi plus facilement la conversation avec les visiteurs grâce à ces affiches.»
Les skieurs, eux, se montrent plutôt enthousiastes: «Une station de sports d’hiver, surtout à l’heure de l’après-ski, est un endroit idéal pour rencontrer des gens. Je vais recommander à mes amis célibataires de venir ici», dit Fabio, 23 ans, qui est venu pour la journée de Thoune. «C’est une bonne idée, car cela renforce le côté convivial de cette petite station», ajoute Tina, snowboardeuse bernoise de 29 ans. En haut de la piste, Anna et Frederik se montrent eux aussi convaincus par l’initiative: «Le sport, c’est le meilleur moyen de se rencontrer! Les plus grandes stations devraient faire la même chose.»
Le domaine d’Elsigenalp entend renforcer le côté participatif de l’action: il organise à présent un concours en ligne pour trouver de nouveaux conseils de drague. A la clé, des cartes journalières gratuites pour les meilleurs «conseillers en amour». Et Dominik Honegger pense déjà à l’étape suivante: «Chaque skieur pourrait porter un numéro. Et le soir venu, il sera possible de faire le lien sur notre page Facebook avec l’un des numéros aperçus sur les pistes.»
Le responsable va même plus loin, à l’approche de la Saint-Valentin: «Nous allons peut-être lancer des soirées de patinage pour célibataires. Et par la suite, pourquoi pas des téléskis Elle Elle ou Lui Lui?» De quoi faire jaser dans l’Oberland bernois. Et en Suisse romande? Certaines stations jouent aussi la carte séduction. A Verbier, on propose par exemple des brassards verts pour repérer les «singles» lors de la Saint-Valentin. Toujours à l’occasion de la fête de l’amour, la station des Rousses, en France voisine, va jusqu’à instaurer des files d’attente spéciales pour les célibataires. Gare aux resquilleurs!
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Une version de cet article est parue dans le quotidien Le Matin.