En accueillant officiellement le Chancelier autrichien ce vendredi à Berne, la Suisse commet une faute politique. Cette triste affaire pose une fois de plus la question de la participation d’Adolf Ogi au Conseil fédéral.
Plus qu’une erreur ou une stupide gaffe, c’est une vraie faute politique qui sera commise ce vendredi à Berne par Adolf Ogi. Le Président de la Confédération, flanqué de ses ministres des finances et des affaires étrangères, va accueillir avec pompe le Chancelier Schüssel pour sa première visite officielle depuis l’entrée de l’extrême droite au gouvernement autrichien.
Alors que les membres de l »Union européenne maintiennent leur cordon sanitaire et symbolique autour du Chancelier viennois, la Suisse l’accueille à bras ouverts et se réfugie derrière une coutume folklorique pour se justifier: une tradition veut, paraît-il, que chaque nouveau chef de gouvernement autrichien réserve à la Suisse sa première visite à l’étranger. Et alors?
On évoque aussi la sacro-sainte neutralité helvétique pour expliquer l’attitude d’ouverture du Conseil fédéral. Ainsi, la Suisse devrait se montrer tolérante et prête à discuter avec cette Autriche qui compte dans son gouvernement des ministres appartenant à un parti fièrement xénophobe. A ce chapitre-là, il est vrai qu’Adolf Ogi n’a de leçon à donner à personne. L’homme qui sert de cache-sexe à l’UDC blochérienne est bien placé pour entendre l’argumentaire emberlificoté de Wolfgang Schüssel.
Si Adolf Ogi se montre particulièrement tolérant envers son homologue de Vienne, c’est aussi pour défendre son propre fauteuil et on le comprend: comment pourrait-il refuser d’accueillir un Chancelier autrichien compromis avec l’extrême droite alors qu’il est lui-même le représentant de l’UDC au Conseil fédéral? Le Président de la Confédération préfère enfouir sa tête dans le sable et attendre la fin de la tempête. Qui a parlé de politique de l’Autriche?
Dans cette triste affaire, on aurait pu espérer un peu plus de sens politique de la part du gouvernement suisse. A l’heure où la presse internationale reproduit dans ses pages les fiches morphologiques qui servent de bulletins de vote aux citoyens d’Emmen, il s’agit de choisir son camp et de le montrer: condamner fermement toute banalisation de la xénophobie. Le faire au moins par intérêt, si ce n’est par conviction.
Comment pourra-t-on, sinon, s’offusquer du tollé de la presse internationale qui met la Suisse et l’Autriche dans le même sac du populisme alpin?
