LATITUDES

«Docteur, j’ai oublié de prendre mon médicament»

L’oubli ou le refus du patient de suivre le traitement prescrit est courant. Pour pallier ce problème, l’injection périodique du médicament est utilisée en psychiatrie, ainsi que les consultations personnalisées auprès des pharmaciens pour les maladies chroniques.

Depuis plusieurs années, Chin Eap, professeur associé au centre des neurosciences psychiatriques, est confronté au même problème: l’arrêt ou la mauvaise prise des médicaments par les patients. Un phénomène qui atteint des dimensions considérables: «Après trois mois en moyenne, la moitié des patients qui doivent prendre un traitement médicamenteux par voie orale ne respecte plus le traitement prescrit par le médecin.»

La «non-observance» médicamenteuse s’avère particulièrement problématique sur le long terme dans le traitement de certaines pathologies psychiatriques, comme la schizophrénie. «Après un premier épisode aigu et une rémission complète, il faut encore compter douze à vingt-quatre mois de traitement par la suite», explique le prof. Chin Eap.

Une solution de substitution à la forme orale des médicaments permet de pallier les écarts, conscients ou non, des patients atteints de troubles psychiatriques : les injections de forme dépôt. Au lieu de prendre un médicament quotidien par voie orale, les patients peuvent choisir une injection mensuelle ou bimensuelle. «Ce processus se fait d’entente avec le patient. Il permet notamment d’éviter d’oublier de prendre les antipsychotiques utilisés dans le traitement de la schizophrénie.»

La forme dépôt doit néanmoins être appliquée avec vigilance: «S’il y a un problème d’effet secondaire, le médicament reste plus longtemps dans l’organisme. C’est pourquoi nous initions toujours un traitement antipsychotique par la voie orale, avant de passer à la forme dépôt.»

«Désamorcer les croyances»
Autre solution: depuis 2003, la pharmacie de la Policlinique médicale universitaire (PMU) propose des consultations d’«adhésion thérapeutique» afin d’accompagner les patients dans l’intégration de leur traitement. «Nous sollicitons les patients qui éprouvent des difficultés à prendre des médicaments sur une longue durée, par exemple dans le cas d’une maladie cardiovasculaire, explique la Dresse Marie Schneider, pharmacienne responsable de la consultation. Nous les amenons à trouver des solutions par eux-mêmes.»

Les séances, qui peuvent s’étirer sur plus de six mois, portent leurs fruits: «Par exemple, une patiente hypertendue pensait qu’elle devait prendre ses deux médicaments à deux moments différents, et elle oubliait souvent de prendre le second. Nous lui avons expliqué qu’elle pouvait les ingérer en même temps. Nous tentons de désamorcer les croyances.» Quelque 150 patients sont actuellement suivis par la pharmacie, en étroite collaboration avec les médecins prescripteurs et les infirmières.

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Une version de cet article est parue dans CHUV Magazine.