KAPITAL

Le succès des smartphones sature les réseaux

Le trafic de données explose sur les réseaux mobiles, du fait de la consommation accrue de vidéos. Et les fournisseurs tardent à investir. Où sont les solutions?

«Depuis le lancement de l’iPhone, le trafic de données double tous les 8 mois sur le réseau Swisscom», explique Christian Neuhaus, porte-parole de l’opérateur national. Même constat chez Sunrise. Orange subit une hausse encore plus forte: «Le trafic a été multiplié par 30 au cours des 3 dernières années, dit Marie-Claude Debons, porte-parole d’Orange. Et le boom ne s’arrête pas.»

Les smartphones, iPad et autres tablettes électroniques se généralisent et, avec eux, un trafic de plus en plus lourd à gérer pour les opérateurs télécom. Envoyer des mails, surfer sur le Web, visionner un clip YouTube, autant d’usages qui nécessitent beaucoup plus de bande passante qu’une simple communication vocale.

Cette énorme quantité de données pousse les équipements télécom à la limite de leurs capacités. Pendant les heures de pointe et dans les zones très fréquentées, les usagers voient la vitesse de connexion chuter. Un phénomène accentué si la zone ne comporte pas beaucoup d’antennes. Car la vitesse du réseau data (UMTS) dépend du nombre de personnes connectées par antenne. Les débits affichés dans les prospectus des opérateurs (typiquement 7,2 Mbits/s) sont en réalité toujours partagés par un grand nombre d’usagers.

«Dans les lieux bondés, le réseau est parfois complètement saturé», confirme Huma Khamis de la Fédération romande des consommateurs (FRC). L’organisation a réalisé en novembre dernier une étude sur la qualité de l’Internet mobile en Suisse. Swisscom arrive en tête de classement, suivi par Sunrise puis Orange, qui prend clairement la dernière position. Effectuée à la même période, une autre enquête du magazine allemand Connect dresse le même classement. Dans le cas d’Orange, l’étude constate «une diminution notable de la qualité de la connexion et de la vitesse avec l’utilisation croissante du réseau à partir de midi.» Marie-Claude Debons d’Orange répond: «Ces résultats ont confirmé le besoin d’amélioration que nous avions déjà annoncé en juin 2010. Les travaux de modernisation ont d’ailleurs déjà débutés la même année.»

Se connecter depuis un train présente encore de gros problèmes. «Les ralentissements et les coupures touchent beaucoup les voyageurs, souligne Huma Khamis de la FRC. Les opérateurs ont encore d’énormes progrès à faire quant à la couverture du réseau UMTS en dehors des villes.» Conscients du problème, Swisscom, Sunrise et Orange ont commencé à installer dans les wagons CFF des répéteurs UMTS, des appareils permettant au signal 3G d’être mieux relayé à l’intérieur de la cabine. «La modernisation prend un certain temps car ces dispositifs ne sont posés qu’au moment de la révision des wagons», relève Roger Schaller, porte-parole de Sunrise.

Au niveau national, Swisscom parle de centaines de millions de francs investis chaque année dans la modernisation de l’équipement, afin de répondre au trafic croissant. Orange avance un montant de 700 millions sur une période de 5 ans, Sunrise de 1 milliard sur la même période. Christian Neuhaus rappelle que Swisscom installe 300 nouvelles antennes par an. «Les permis de construire ne sont pas faciles à obtenir car nous recevons beaucoup d’oppositions. L’attente dure en général 3 à 5 ans jusqu’à la mise en service.» Marie-Claude Debons d’Orange dresse le même constat: «Les conditions imposées par les communes et les recours freinent la modernisation et peuvent nous empêcher de répondre aussi vite qu’on le souhaiterait aux besoins des clients.»

Le haut débit mis aux enchères

Parallèlement, les trois opérateurs augmentent fréquemment la capacité des installations existantes en implémentant sur le réseau UMTS les dernières normes HSPA+ (UMTS 3,5G). Swisscom est le premier opérateur à être passé à une vitesse maximale de 42 Mbit/s, une technologie que le géant bleu déploie dans 6 grandes villes suisses.

A l’horizon 2012, la nouvelle technologie mobile LTE pourra atteindre 100 Mbit/s et plus. La norme nécessite de nouvelles antennes mais aussi de nouveaux téléphones capables de supporter ces hauts débits (l’iPhone 4 atteint 7,2 Mbits/s au maximum). L’ensemble des fréquences du réseau mobile seront mises aux enchères en début 2012 par la Commission fédérale de la communication. Swisscom, Sunrise et Orange vont s’affronter pour la bande passante, notamment les fréquences nécessaires à la LTE. «Nous installerons les premières antennes LTE l’année prochaine, dès que nous disposerons des nouvelles licences, assure le porte-parole de Swisscom. Un projet pilote débutera cet automne.» La capacité du réseau promet donc de s’améliorer.