Avec plus de 5 millions de visiteurs par an, les zoos sont en tête des attractions touristiques du pays. Ils s’engagent désormais pour la sauvegarde des espèces.
L’attraction touristique la plus visitée de Suisse? Ce n’est ni le Cervin ni le pont de Lucerne, mais le zoo de Zurich, avec 1,8 million de visiteurs annuels. Il est talonné de près par celui de Bâle, qui a totalisé 1,6 million d’entrées en 2010.
En tout, ce sont plus de 5 millions de personnes qui ont fréquenté les zoos suisses l’an dernier. Des chiffres qui n’étonnent pas Jean-Christophe Vié, directeur adjoint du programme pour les espèces de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) à Gland et coordinateur de la célèbre Liste rouge des espèces menacées: «Selon nos estimations, plus de la moitié de l’humanité s’est rendue dans un zoo une fois dans sa vie. Ces institutions ont un impact énorme sur l’éducation. Elles sont devenues le seul moyen pour bon nombre de personnes d’entrer en contact avec le monde animal sauvage.»
Il est loin le temps des lions malheureux dans de minuscules cages, l’époque où Brigitte Bardot mobilisait l’opinion publique contre ces prisons à animaux. «Il existe toujours des mouroirs qui servent de façade aux pires trafics, poursuit Jean-Christophe Vié. Mais la grande majorité des zoos, surtout en Europe, ont passablement évolué ces dernières années et sont devenus des acteurs centraux de la conservation de la nature. Je peux comprendre que l’on critique la captivité des animaux. Mais il faut savoir que ces derniers sont, la plupart du temps, déjà perdus pour la nature, en raison de la destruction de leur habitat.»
Les cages ont disparu des zoos, qui se focalisent désormais sur le bien-être de leurs pensionnaires. A Bâle par exemple, toutes les bêtes vivent dans leur biotope naturel reconstitué. Les enclos sont délimités par des obstacles comme des bassins. «Nous avons développé tout un savoir sur les besoins des animaux, indique Olivier Pagan, directeur du zoo de Bâle. Non seulement nous leur donnons plus d’espace, mais nous structurons ce dernier avec des arbres, des grottes ou des bassins qui offrent à chaque individu la possibilité de retrouver ses repères naturels. Nous mélangeons aussi les espèces et leur permettons de se reproduire, ce qui évite qu’elles ne s’ennuient.»
En 2011, les objectifs revendiqués par l’association Zooschweiz, qui regroupe les plus grands zoos de Suisse, sont l’éducation et la conservation des espèces. Expositions temporaires, fiches signalétiques, guides, tout est mis en œuvre pour favoriser la connaissance des espèces et sensibiliser le public à leur disparition. Du côté de l’écologie, les zoos luttent sur plusieurs fronts: «Ils financent de nombreux projets sur le terrain, explique Jonas Livet, vétérinaire et fondateur du site leszoosdanslemonde.com. Ils constituent des partenaires de recherche appliquée pour les facultés de médecine vétérinaire des universités. Surtout, ils font office de banque génétique mondiale.»
De plus en plus d’espèces n’existent en effet plus que dans les zoos. La Liste rouge de l’UICN a même créé une catégorie «Eteint dans la vie sauvage». «Les parcs zoologiques jouent un rôle crucial dans le maintien de ces espèces, précise Jean-Christophe Vié. Ils ont déjà connu de grands succès de réintroduction dans la nature, comme avec l’oryx d’Arabie.»
La seule chose que ce spécialiste reproche aux zoos, c’est qu’ils se focalisent trop sur des espèces spectaculaires comme les grands mammifères africains, au détriment d’espèces locales, parfois plus importantes pour la biodiversité. Une situation qui s’explique par le fait que les zoos restent des parcs d’attractions derrière lesquels se cachent des grandes PME qui dépassent parfois la centaine de collaborateurs. «Comme n’importe quelle autre entreprise, nous devons avoir une stratégie de gestion et de marketing efficace», concède Olivier Pagan.
Les revenus des zoos proviennent avant tout des entrées, qui augmentent d’autant plus que l’établissement possède des espèces spectaculaires ou des bébés. Le reste des recettes émane des boutiques souvenirs et des restaurants. Certains zoos font appel à des donateurs et à des subventions étatiques: celui de Zurich perçoit 25% de subventions, celui de Bâle 10%. Si certains zoos allemands se livrent une compétition féroce, comme cela a pu être le cas avec l’ourson Knut, cela ne semble pas être le cas des établissements suisses: «Notre principal concurrent n’est pas Bâle, mais ce sont les autres loisirs, en particulier les grands centres commerciaux», affirme Alex Rübel, directeur du zoo de Zurich. Son entreprise rivalise d’ailleurs d’imagination pour attirer toujours plus de monde: mariages, séminaires d’affaires ou camping au zoo, toutes les idées sont bonnes pour séduire le public, qui se laisse appâter.
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Zurich
Le zoo le plus visité de Suisse a inauguré en 2003 la Masoala-Halle, une serre de 11 000 mètres carrés, qui reproduit l’écosystème de la forêt malgache. Situé en dehors de la ville, il prévoit de doubler sa surface d’ici à 2030.
Création: 1929
Visiteurs annuels: 1,8 million
Employés: 130
Chiffre d’affaires: 23 millions de francs, dont 25% de subventions
Nombre d’animaux et superficie: 4000 animaux sur 27 hectares
Attraction: Bébés tigres, nés le 15 mai dernier
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Bâle
Le zoo de la cité rhénane est le plus ancien de Suisse. Il a longtemps culminé en tête du classement avant de se faire dépasser par Zurich. Situé au centre-ville, son développement reste limité. Sa direction a annoncé la construction d’un aquarium géant d’ici à 2015.
Création: 1879
Visiteurs annuels: 1,69 million
Employés: 145
Chiffre d’affaires: 16 millions de francs, dont 10% de subventions
Nombre d’animaux et superficie: 4000 animaux sur 12 hectares
Attraction: Rhinocéros indien
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Servion
Ce zoo de petite taille est géré par une équipe de passionnés. Situé à 800 mètres d’altitude, il s’est spécialisé dans les espèces nordiques, mais possède aussi des espèces indigènes comme des cerfs, des sangliers et des lynx.
Création: 1974
Visiteurs annuels: 140’000
Employés: 6
Chiffre d’affaires: un peu plus d’un million de francs
Nombre d’animaux et superficie: 200 animaux sur 5 hectares
Attraction: Panthère des neiges
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Juraparc
A la base, il s’agissait d’un restaurant possédant un parc de poneys sur un petit alpage jurassien. La famille Blanc a décidé d’en faire un parc animalier en y laissant paître des bisons, qui ont été rejoints par des chevaux, des loups et des ours au fil des ans.
Création: 1987
Visiteurs annuels: 60’000
Employés: 2
Chiffre d’affaires: 300’000 francs
Nombre d’animaux et superficie: 30 animaux sur 7 hectares
Attraction: Cohabitation d’ours avec une meute de loups
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Une version de cet article est parue dans L’Hebdo.
