La masseuse opère nue mais refuse tout contact sexuel: tel est le principe de ces nouveaux lieux de relaxation. Visite.
«Nos massages sont sans connotation sexuelle», peut-on lire sur le site internet de Crystal Massage, un salon qui vient d’ouvrir à Genève, dans une rue sage et discrète du quartier des Pâquis. Une précision qui a son importance quand on sait que, lors de ces séances un peu particulières, la masseuse opère dans le plus simple appareil.
D’où la nécessité de calmer les inévitables ardeurs de la clientèle. Celle-ci doit respecter une charte précise durant la «prestation»: le client ne peut en aucun cas se caresser les parties intimes ou toucher la masseuse. «Il s’agit de massages sensuels, pas sexuels», précise la gérante Kelly Rumjaun. Concrètement, la jeune Française de 24 ans, qui officie seule pour l’instant, accueille depuis quelques semaines sa clientèle (essentiellement des hommes âgés de 35 à 65 ans) dans un hall d’entrée très spacieux et lumineux, faisant penser à un spa ou à un centre de beauté haut de gamme.
Le client est ensuite dirigé vers l’une des deux chambres de massage (lumière tamisée, bougies, senteurs d’encens, miroirs aux murs), où il enlève ses vêtements. Avant d’aller prendre une douche, passage obligatoire.
Le prix des séances démarre à 220 francs pour un massage naturiste d’une heure. La masseuse s’occupe du client (en évitant ses parties intimes) et termine la séance à… califourchon au-dessus de sa tête! Pour sa part, le client est d’abord allongé sur le ventre, puis sur le dos. Dans ce contexte pour le moins pimenté, elle n’hésite pas à «bloquer les bras des clients les plus entreprenants avec ses genoux», lors de la très délicate phase finale. Afin de prévenir tout problème plus sérieux, le site est protégé par une alarme. Cela dit, «avoir une érection est tout à fait normal, souligne la jeune masseuse. Cela montre que le client a apprécié.» On l’aura compris, mieux vaut ne pas être trop à cheval sur les questions de pudeur une fois franchie la porte d’entrée.
Compte tenu des tarifs — jusqu’à 360 francs pour un massage «reflet du miroir» d’une heure et demie —, la clientèle visée est plutôt aisée: «Nous travaillons en partenariat avec des hôtels cinq étoiles situés dans le quartier. Ils nous envoient des clients lorsque leur propre salon de massage affiche complet», précise Kelly Rumjaun, qui ne compte pas en rester là: après Genève, elle vise Zurich, et même l’international.
Dérivées du massage californien — apparu aux Etats-Unis au début des années 70 — ces séances, qui jouent dans une sorte de zone grise «éroticozen» et qui ne s’adressent pas en particulier aux naturistes, se répandent de plus en plus en Europe. Une chaîne d’instituts spécialisés nommée Szen compte par exemple une vingtaine d’établissements en Europe et a déjà ouvert deux centres en Suisse romande, dont un à Genève et un autre à Lausanne.
Chez Crystal Massage, on s’inscrit clairement dans une ligne de massages de «bien-être», faits de «longs mouvements doux et fluides». Le fait que la masseuse, qui exerce cette profession depuis plusieurs années, soit nue, est présenté, au-delà de la charge érotique, comme un moyen de permettre à certains sujets «complexés» de mieux s’accepter «au travers du regard de l’autre», selon Kelly Rumjaun. Pas sûr que la clientèle ciblée soit uniquement motivée par cette philosophie empruntée au naturisme…
_______
Une version de cet article est parue dans l’Hebdo.
