LATITUDES

Prévoir les secousses sismiques en observant les animaux

Cela aurait été utile à Haïti. Parmi les signes annonciateurs des tremblements de terre, la soudaine agitation des animaux est souvent considérée comme un indice fiable. Une piste que la science continue d’explorer.

Les Suisses étaient bien tristes de ne pas voir leurs compatriotes secouristes partir avec des chiens pour tenter de sauver des Haïtiens enfouis sous des décombres. Des images auxquelles nous sommes habitués au lendemain de catastrophes. L’odorat de ces animaux fait alors des miracles.

Et si les facultés particulières des animaux pouvaient non seulement se révéler précieuses après le drame, mais aussi avant qu’il ne survienne? Avant que la terre ne bouge, des signes avant-coureurs se manifestent: variation du champ magnétique local, augmentation de la circulation des eaux souterraines, diminution de la résistivité des roches, légères déformations de la surface du sol… Des moyens de détection existent (sismographe, géoscope, interféromètre) mais ils n’ont pas suffi jusqu’ici à éviter le pire.

La sismologie, la science des ondes qui se propagent dans la terre, est née à la fin du XIXe siècle et s’est vraiment développée après le tremblement de terre de San Francisco en 1906. Aujourd’hui encore, malgré les progrès effectués, les spécialistes ne peuvent dire où et quand surviendra le prochain séisme.

Pourquoi n’a-t-on pas prêté attention à telle ou telle prédiction non scientifique, se reproche-t-on parfois après la survenue du malheur? En Haïti, les esprits vaudous n’ont pas été écoutés… Quant aux animaux, ils semblent réagir, mais les humains restent insensibles à leurs avertissements.

Les animaux seraient très sensibles à l’imminence d’un danger, particulièrement aux changements du champ électromagnétique qui précèdent un tremblement de terre. Certains de leurs sens sont beaucoup plus développés que ceux des humains, mais une prédiction fiable peut-elle être obtenue par l’observation de leurs comportements?

Depuis fort longtemps l’usage prévisionnel du comportement animal est relaté. Un siècle avant notre ère, l’historien grec Diodore remarque que cinq jours avant un séisme, les souris, les belettes et les scolopendres quittent leur trou et errent en tous sens. Une attitude anormale (fuite ou nervosité sans raisons apparentes) des animaux fut signalée avant les tremblements de terre de San Francisco en 1906, de Tokyo en 1923 et du Frioul en 1976.

Grâce à eux, le 4 février 1975, une ville, Haicheng, au nord-est de la Chine a été évacuée. On s’est alarmé à bon escient de leur comportement suspect. Un séisme de magnitude 7,5 sur l’échelle de Richter s’est produit quelques heures après.

Deux jours avant le tremblement de mai 2008, en Chine toujours, des milliers de crapauds se sont rués sur un pont de la ville de Taizhou. Ce comportement inhabituel n’a malheureusement pas alerté les autorités locales sur l’imminence d’une secousse.

Ces exemples relèvent-ils du paranormal ou de l’anecdotique? Les scientifiques n’écartent aucune piste. Leurs recherches menées en laboratoire sur les animaux n’ont pour l’heure pas permis d’étayer l’hypothèse de leur capacité à anticiper. Le chercheur britannique Rupert Sheldrake, connu pour ses publications sur les sens de nos animaux domestiques, vient d’émettre une proposition digne d’intérêt: centralisons sur internet toutes les observations relatives aux comportements anormaux de nos animaux. Cela permettrait de constituer une très précieuse banque de données, à même de vérifier ou d’infirmer toutes les histoires qui se racontent…

L’écoute des réactions animales pourrait ainsi permettre, à terme, de prévoir les tremblements de terre. Tout comme l’usage des accéléromètres présents dans les laptops a été sollicité par une équipe de sismologues californiens.