TECHNOPHILE

Apple plonge dans l’univers du X

Steve Jobs présentait jeudi le nouveau système d’exploitation du Macintosh. Le Mac OS X s’annonce élégant, stable et puissant.

Depuis jeudi, on en sait un peu plus sur la stratégie d’Apple et sur son nouveau système d’exploitation, le Mac OS X, que nous avions déjà évoqué ici. Lors du show annuel Macworld Expo de San Francisco, Steve Jobs – qui a lâché son titre de patron intérimaire (iCEO) pour celui de directeur exécutif à part entière – n’a pas déçu la communauté informatique en dévoilant les principales caractéristiques de la future plate-forme.

Le X du nouveau système de Macintosh est hérité d’Unix, le noyau utilisé par le monde informatique professionnel depuis des décennies. Réputé pour sa fiabilité, Unix s’est aussi rendu célèbre par sa relative complexité d’utilisation et ses commandes cryptiques (ls –l pour lister un répertoire, mv pour renommer un ficher, etc.). Depuis sa création dans les années 1970 dans les laboratoires Bell puis à l’Université de Berkeley, de nombreuses versions du système ont été développées, dont le célèbre Linux, un Unix destiné au PC distribué gratuitement. Unix étant avant tout un projet de recherche académique, le code source a toujours été modifiable et réutilisable par quiconque. Le code du noyau du Mac OS X, baptisé Darwin («parce qu’il représente la nouvelle génération dans l’évolution», dit Apple), sera aussi disponible gratuitement.

Apple n’entend cependant pas abandonner ce qui a fait son succès: la simplicité d’utilisation. Le Mac OS X devra donc prendre le meilleur des deux mondes: la solidité d’Unix et la facilité du Mac. Le noyau Unix sera complètement transparent pour l’usager qui ne se rendra pas compte que sous les belles fenêtres graphiques tourne un système puissant et complexe, promet Apple. Le nouveau Mac OS sera commercialisé dès janvier 2001.

Par rapport au Mac OS 9 actuel, les principales innovations d’OS X sont les suivantes:

La mémoire protégée

Les systèmes d’exploitations modernes, y compris Windows, divisent les zones mémoires entre les applications. Chaque programme utilise une partition mémoire bien définie, octroyée lors du lancement du programme. On parle alors de «mémoire protégée», car une application ne pourra pas en gêner une autre lorsqu’elle effectue une opération illicite. Ce n’est pas le cas du Mac, qui utilise la même zone pour tous les programmes. Cela engendre des transferts de données importants à chaque fois que l’usager passe d’un logiciel à l’autre. Surtout, lorsqu’une application gèle, c’est l’ensemble de la machine qu’il faut redémarrer car toute la mémoire vive est affectée. L’OS X proposera enfin une mémoire protégée aux utilisateurs du Mac, ce qui augmentera considérablement la fiabilité des ordinateurs.

Des processus indépendants

Sur un Macintosh actuel, le processeur cesse de calculer lorsque l’usager déplace une fenêtre ou sélectionne et maintient la souris appuyée sur un menu. Certaines fonctions (comme les menus) ne peuvent en effet pas être exécutées simultanément. D’autre part, lorsque l’ordinateur est occupé à une tâche prioritaire, il devient impossible de l’interrompre. Les systèmes les plus fiables, comme Unix, permettent au processeur de dissocier clairement chaque action. A tout moment, l’usager peut ainsi reprendre le contrôle de la machine et interrompre une tâche, même si elle a été définie comme prioritaire par le processeur. L’ordinateur réagit constamment aux commandes et devient donc beaucoup plus efficace et agréable à utiliser. On parle alors de systèmes «préemptifs». Mac OS X sera de ceux-là.

Multiprocesseurs

Les Macintosh ne possèdent qu’un seul processeur, même s’ils sont parfois équipés de co-processeur (cartes graphiques, d’acquisition d’image, de son, etc.). Le système professionnel Windows NT 4.0 de Microsoft gère lui jusqu’à quatre processeurs en parallèle. Une des grandes qualités d’Unix consiste à gérer un nombre important de processeurs simultanément. Le Mac de la prochaine génération sera un ordinateur SMP («symmetric multiprocessing­»): plusieurs applications pourront tourner chacune sur un processeur différent ou se partager un même processeur. Pour traiter une image plus rapidement, l’usager pourra par exemple attribuer plusieurs processeurs à Photoshop, ce qui entraînera un important gain de performance.

Compatibilité

En profitant de la compatibilité d’Unix, Mac OS X bénéficiera instantanément d’une foule de programmes. Le logiciel serveur Apache, le plus utilisé sur le Web, s’installera par exemple sans problème sur un Mac, prétend Apple. En plus, l’usager d’un Mac actuel ne devra pas racheter ses logiciels: une fenêtre d’émulation permettra de réutiliser les vieux programmes sur la nouvelle plate-forme.

Graphisme

Plusieurs gadgets graphiques ont été récupérés de NeXt, la firme créée par Steve Jobs après Apple. Le Mac OS X s’annonce donc très élégant: les boîtes de dialogue et les menus sont légèrement transparents et on pourra empiler les fenêtres dans des icônes au bas de l’écran (dans ce qu’Apple a baptisé «The Dock»), un peu comme dans la barre Windows, en plus joli… Le Mac OS X exploitera les librairies graphiques les plus puissantes du marché (Open GL), ce qui devrait rendre les jeux en 3D époustouflants. Pour autant que les bugs soient fixés: lors de la démonstration à Macworld Expo, le vice président d’Apple Phil Schiller a tenté de lancer Quake III pour épater l’assemblée, mais le jeu a refusé de démarrer…