En moins de trois ans, plus de 10 millions d’utilisateurs ont déjà adopté Twitter. Courtisée par les investisseurs, la plateforme prend de vitesse Facebook et les médias traditionnels.
Twitter(en français «gazouiller») deviendra-t-il à Internet ce que le SMS est à la téléphonie mobile? Cette plate-forme de «microblogging» fonctionne en tout cas selon le même principe enfantin: décrire en quelques mots (140 caractères au maximum) ses activités du moment et s’abonner aux mises à jour des personnes ou thèmes que l’on désire suivre depuis son PC ou son mobile.
L’histoire aurait pu en rester là, cantonnée à des bribes de conversations anodines comme «Je suis en train de manger», «En retard de quinze minutes», «Le voisin me casse les oreilles avec sa perceuse». Sauf que Twitter, qui a déjà séduit 10 millions d’adeptes à travers le monde, a dépassé sa vocation initiale – celle de répondre simplement à la question «Que faites-vous?» – pour se muer en puissant canal d’informations en flux continu.
Les événements récents qui ont marqué l’actualité (amerrissage de l’Airbus dans l’Hudson ou incendies en Australie) ont d’abord été commentés en direct sur Twitter avant d’être relayés par les agences et médias traditionnels.
Twitter permet aussi aux politiques, stars du show-business ou grandes marques de toucher directement un public de fans, abonnés à leur flux (feeds). Barack Obama, qui a beaucoup utilisé ce média durant sa campagne, compte ainsi plus de 375’000 «followers», soit le nombre d’inscrits qui ont accès à ses mises à jour. «On vient juste de faire l’histoire», avait notamment posté le président des Etats-Unis juste après la confirmation de son élection. L’exemple a fait des émules: plus de 20% des sénateurs américains sont sur Twitter.
Basée en Californie, la plate-forme bénéficie de la manne d’investisseurs de poids (Institutional Venture Partners et Benchmark Capital) qui lui ont apporté 35 millions de dollars à la mi-février. Au total, la société a déjà levé plus de 55 millions.
Tout récemment, Facebook, qui sent le vent tourner, a tenté de racheter sans succès la prometteuse plate-forme pour 500 millions de dollars. Pourtant, le modèle économique de l’entreprise reste incertain même si, selon Raphaël Briner, fondateur de la plate-forme de réseautage Hyperweek.com, «le contrôle des flux sur le Web va signifier, à terme, le contrôle des marchés publicitaires».
L’usage en vogue est celui des grandes conférences. Plus de 130’000 followers suivent déjà le World Economic Forum (WEF) à travers le mot-clé «Davos». «Cet engouement est invraisemblable, s’enthousiasme Matthias Lüfkens, responsable média du WEF. La grande force de Twitter, c’est le temps réel. Nos collaborateurs qui suivent une conférence peuvent ainsi transmettre en direct et en continu de courts messages, par exemple une citation d’un intervenant ou un autre élément essentiel, avant même de rédiger une synthèse sur notre site Internet. Lors du dernier forum, toute l’équipe de la BBC était branchée sur Twitter. Un journaliste de Reuters a même utilisé ce canal pour diffuser des informations avant sa propre agence…»
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Une version de cet article est parue dans le magazine économique Bilan du 11 mars 2009.
