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Le triple meurtre du Vatican vu par Gérard de Villiers

C’était il y a presque un an. Trois cadavres étaient découverts au Saint-Siège, dans le corps des gardes suisses. L’auteur de la collection SAS en a tiré un roman jetable. Piere Grosjean l’a lu.

Je viens de finir de lire «L’espion du Vatican», l’aventure de SAS que Gérard de Villiers a consacrée à l’affaire des gardes suisses. C’est un vrai roman de gare qui sent l’after-shave, avec toutes les scènes érotiques de rigueur, imbriquées dans une intrigue absolument abracadabrante. On n’y croit pas une seconde.

Pourtant, cette trame de fiction paraîtrait presque vraisembable comparée à la version officielle défendue par les services du Saint-Siège.

Pour mémoire, selon le Vatican, c’est dans un geste de folie meurtrière que le jeune garde Cédric Tornay aurait assassiné son commandant Alois Estermann et l’épouse de celui-ci, avant de retourner l’arme contre lui. Il semble d’ailleurs que le jeune caporal avait fumé du cannabis avant le meurtre, «ce qui permettrait d’expliquer son comportement», précisait la juge d’instruction en février dernier. Sans rire.

Le médecin légiste mandaté par le Saint-Siège a aussi réussi à dénicher un kyste «de la grandeur d’un oeuf de pigeon» dans le cerveau du présumé meurtrier. Autant d’éléments qui démontrent de manière formelle, selon le Vatican, que le geste triplement fatal de Cédric Tornay relevait de la folie furieuse.

Aux esprits sceptiques qui suggèrent une possible intervention extérieure, le Vatican réplique que de toute manière, «l’étroitesse des lieux n’aurait pas permis la présence dans la salle de séjour-bureau d’une quatrième personne». Point final, l’affaire est classée.

Evidemment, le livre de Gérard de Villiers défend une version un peu plus complexe, même si à titre personnel, l’auteur semble s’être rangé derrière les conclusions du Vatican: «La thèse du coup de folie est la bonne», déclarait-il en novembre au magazine suisse L’Illustré, présentant son bouquin comme une pure fiction.

Cependant, dans le même entretien, et sans craindre la contradiction, Gérard de Villiers soutenait que trois protagonistes du drame avaient appartenu à des services secrets: le commandant des gardes suisses Alois Estermann aurait travaillé pour la RDA (une thèse déjà présentée par le journal allemand Berliner Kurier); son épouse Gladys aurait oeuvré pour la CIA; et le confesseur de Cédric Tornay aurait appartenu aux renseignements du Vatican.

C’est précisément le point de départ de cette aventure de SAS. Dès le premier chapitre, le jeune caporal valaisan, qui s’appelle ici Stephan Martigny, est abattu par son confesseur, le Père Hubertus, qui tue dans la foulée le commandant et son épouse. L’ecclésiastique maquille ensuite le triple crime afin de faire croire au réglement de compte d’un jeune caporal humilié par son supérieur. Le Père Hubertus est visiblement manipulé, mais par qui?

Appelé à élucider l’affaire, le puissant Malko se rend alors au Saint-Siège pour mener l’enquête. Il s’y fait violer par une splendide rousse, par une brune effarouchée et par une plantureuse blonde, toujours consentant, et toujours selon le même schéma: la femme se jette «sauvagement» sur lui.

Gérard de Villiers rappelle au passage que son héros est doté d’une virilité imposante, tout comme le jeune garde suisse assassiné: «Stephan Martigny était très beau, très doux et très bien monté. Un véritable étalon.»

C’est la loi des SAS: la longueur du sexe distingue les bons de méchants. Le véritable salaud de l’affaire, un Monsignor espagnol haut placé, est d’ailleurs doté d’un pénis «minuscule». Il est aussi très laid, dégarni et obsédé sexuel. C’est lui qui est à l’origine du triple crime.

Espion aux ordres de Moscou, ce prélat espagnol avait manipulé le Père Hubertus afin de se débarasser du commandant des gardes suisses. Pour un motif très simple: ce dernier l’avait surpris alors qu’il photocopiait des documents classés top secret de la diplomatie vaticane.

Voilà, selon Gérard de Villiers, la clé de l’énigme du triple meurtre au Saint-Siège: une bête histoire d’espionnage Est-Ouest maquillée en réglement de comptes, comme au bon vieux temps.

DIx ans après la chute du Mur, la guerre froide recommence à bouillir. Mais elle reste glaciale dans les romans bon marché.

«L’espion du Vatican», de Gérard de Villiers, collection SAS.

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Pierre Grosjean, 35 ans, n’avait jamais lu de roman SAS avant celui-ci.