Les présentations Powerpoint ont entraîné un certain formatage de la pensée. D’autres méthodes de prise de parole en public font leur apparition. Comme un retour du facteur humain.
Parmi les mésaventures engendrant un énorme stress, il en est une nouvelle apparue au cours de cette décennie. Un médecin suisse invité à un congrès à Paris vient d’en faire l’expérience. Arrivé dans la salle de conférence, il découvre que sa clé USB est restée dans son bureau. C’est l’angoisse, l’envie de fuir.
Pareil déboire peut survenir à tout moment. Sans compter les défectuosités de projecteur ou tout autre problème technique nous privant, au dernier moment, d’une présentation Powerpoint sur laquelle on allait s’appuyer.
«A quelque chose malheur est bon», commente aujourd’hui le médecin dont voici la suite de l’histoire. Flatté de compter parmi les orateurs du prestigieux rendez-vous scientifique, il ne peut se débiner. Il doit à tout prix relever le défi. Sans l’appui de l’incontournable prothèse qu’est devenue PowerPoint, il se lance.
Les premières minutes sont hésitantes, puis la passion qui le lie au sujet qu’il traite prend le relais. Sans «bullet points», le miracle se produit: il parvient à convaincre. Davantage encore, il enflamme son auditoire et récolte un succès inespéré. Envié même par les autres orateurs stupéfaits des retombées positives récoltées par cette présentation amputée pourtant du logiciel de Microsoft.
Conquérir un public grâce à une bonne rhétorique est un défi en rien insurmontable à l’heure où un certain ras le bol s’installe dans les auditoires. «La plupart des conférenciers commentent leur présentation PowerPoint. De la sorte, certes, ils informent mais il est rare qu’ils enthousiasment ou qu’ils motivent leur public», estime Harry Holzheu, auteur de «Natürliche Rhetorik ohne Lampenfieber – Der Weg zum freien Reden». Un essai très critique à l’égard de l’uniformisation, par le biais des nouvelles technologies, des présentations que nous subissons. L’auteur souhaite réintroduire le facteur humain, en l’occurrence la rhétorique, au cœur de ces exercices de persuasion que sont les présentations PowerPoint.
Plusieurs ouvrages viennent rappeler que l’intérêt d’une présentation doit demeurer dans le présentateur. Si les slides se suffisent à eux-mêmes, c’est que la présentation est mauvaise.
Pas question néanmoins de jeter le bébé avec l’eau du bain, il ne s’agit pas de supprimer les présentations PowerPoint ou autres mais de les sortir du processus de formatage de la pensée dans lequel elles sombraient.
Avec «Presentation Zen: Pour des présentations plus simples, claires et percutantes» (une traduction d’un best seller américain qui paraît ces jours en français), Garr Reynolds, un expert en communication de renommée internationale, tente de rénover la manière, devenue déjà traditionnelle, de «balancer» des présentations PowerPoint.
«Il convient de rappeler que le style a son importance. S’il est au service de la communication, s’inspirer du Zen: simplicité, subtilité, élégance, suggestivité, naturel, quiétude, éliminer ce qui n’est pas essentiel et ne pas avoir peur du vide», y lit-on.
Une nouvelle science fait ainsi son apparition. Avec le premier livre de «Slideologie. L’art et la science de créer de bonnes présentations», Nancy Duarte entend, elle aussi, briser le ronron de présentations de plus en plus mortifiantes. Derrière le célébre diaporama d’Al Gore, c’est elle…
«Créer une nouvelle idéologie des dias» et «Créer des idées, non des dias», sont les titres des deux premiers chapitres et résument à eux seuls le souffle nouveau que Nancy Duarte aimerait faire pénétrer dans des salles où l’obscurité tant physique qu’intellectuelle gagne du terrain.
Vous repérerez à coup sûr aisément si le prochain présentateur que vous entendrez appartient à la nouvelle ou à l’ancienne génération.
