Après un été de grosses tuiles, les marionnettistes affaiblis et peu bronzés du Conseil fédéral devront affronter l’automne de tous les dangers. Passage en revue des dossiers explosifs.
275’000 francs, voilà, merci, au revoir, le bonjour chez vous, rompez! Et surtout, surtout qu’on ne vous revoie plus. Les conditions du départ de l’ex-chef de l’armée Roland Nef auront donc été la première décision d’un Conseil fédéral revenu de sa vacance estivale.
Ni mesquin, ni royal, le cadeau au brigadier carbonisé: peu importe, c’était juste une mise en jambe. Ce qui attend les sept sages les mois à venir relève en effet d’un tout autre folklore. Surtout que nos marionnettistes semblent loin de tenir une pêche d’enfer.
A tout loser, tout honneur: Schmid. Le Bernois a sauvé de justesse sa tête dans l’affaire Nef, mais seulement grâce au soutien très égoïste de ses collègues. Qu’un conseiller fédéral puisse se faire éjecter par la seule et mesquine volonté d’un parti d’opposition revanchard et pour une petite cachotterie, cela aurait créé une jurisprudence affaiblissant le strapontin de chacun dans le théâtre gouvernemental.
Schmid donc s’avance sérieusement déplumé pour défendre le budget sur l’armement, l’achat de nouveaux avions et son élection à la vice-présidente de la Confédération en décembre.
Si radicaux et PDC feront plutôt profil bas, les socialistes — et les Verts — s’allieront mécaniquement avec ce qui pour eux est pire que le diable: cette UDC qu’ils vilipendent à longueur d’année sur un ton et avec une morgue idéologique ne faisant que renforcer la droite musclée, et la conforter dans ses options brunâtres.
Drôle de coalition où l’on s’agglutine pour des raisons à peu près irréconciliables. A gauche, verts et socialistes se laissent voluptueusement aller à leur pente génétique de l’antimilitarisme de principe. A leurs yeux, l’armée est déjà largement gavée. Haro donc sur les joujoux volants et les budgets gonflés de Schmid.
A droite, au contraire, pour l’UDC et ses fantasmes de gloriole nationale, les forces armées de la Confédération ne seront jamais assez nourries. Ce qui, ajouté à la détestation du titulaire du poste, poussera à rejeter tout ce qui vient du Département de la défense.
Cette discipline non olympique et pourtant si délicate du grand écart, Moritz Leuenberger aura intérêt, aussi, a en bien posséder les arcanes. Lui, l’ancien militant anti Kaiseraugst, devra sans doute, approvisionnement énergétique oblige, céder aux compagnies d’électricité le pressant d’autoriser la construction de nouvelles centrales nucléaires. Couleuvres fumantes en perspective.
Quant à la si réservée, la si modeste Eveline Widmer Schlumpf, elle devra surtout se coltiner du médiatiquement très explosif: la question des rémunérations des conseils d’administration et l’imprescriptibilité des actes de pornographie enfantine.
Pour la douce Doris Leuthard, c’est encore pire: piques et fourches lui semblent promis, elle qui devra faire avaler à nos valeureux mais un peu ombrageux paysans, l’accord bilatéral sur les produits agricoles.
Couchepin, le président Couchepin, si content de l’être à nouveau, est peut-être le seul qui ait encore l’envie de faire semblant de boire du petit lait. Surtout que personne n’est venu le chatouiller sur ses tribulations chinoises. Et puis, ce qui l’attend, c’est plutôt du classique, un de ces toujours recommencés: enterrer l’initiative syndicale pour une retraite flexible. Et tant pis si chaque fois que le grand homme aborde ce sujet, le parti radical met plusieurs années à s’en remettre.
Du côté de chez Merz, on a beau engranger, le plus discrètement possible, les milliards excédentaires, il n’en faudra pas moins ferrailler avec les lobbyistes de tout poil pour imposer l’idée d’une TVA à 6% dont personne ne veut. Ou plutôt que tout le monde approuve, sauf pour soi-même et sa branche.
Micheline Calmy-Rey, enfin: après les fiascos iranien, libyen et colombien, il ne lui reste plus guère, comme perspective automnale, que celle de raser les murs des ambassades. En silence si possible.
