LATITUDES

Une révolution bio dans l’industrie du wellness

Méfiance à l’égard des substances chimiques et prise de conscience écologique poussent les consommateurs à exiger des cosmétiques et des spas naturels. Enquête.

Rappelez-vous. Il y a encore dix ans, la cosmétique ne jurait que par l’efficacité de nouvelles molécules. A la télévision, les publicités se relayaient pour vanter des substances soi-disant révolutionnaires: 9R, rétinol, pro-xylane et autres noms barbares. A chaque produit sa découverte sensationnelle, sa nouvelle cure de jouvence.

La régénération de l’épiderme par la chimie, c’était un gage de sérieux. Un credo que partageaient les promoteurs de spas. Avec leurs décorum de white cube glacial, leurs soins technologiques, leurs aspersions de particules en tout genre et leur ambiance futuriste façon «Gattaca», les spas lorgnaient du côté de la science dure et de la médecine pour asseoir leur légitimité.

C’était hier. Aujourd’hui, il n’y a qu’à regarder la profusion de tek dans l’aménagement de ces établissements pour saisir que le modèle n’est plus, à de rares exceptions près, la Nasa ou la clinique. La tendance actuelle du spa, plus orientée wellness que médecine, intègre les produits naturels et le bio.

Exemple de cette douce frénésie pour l’organique, le bar à nutrition Yogi Booster du Lausanne-Palace. «On peut y déguster des smoothies, des jus de fruits, des salades, du pain sans gluten et des eaux minérales suisses», détaille sa conceptrice et directrice Emeline Gauer. Que des produits estampillés bio.

«La nature se taille une place dans les produits périphériques des services d’un spa, analyse Stefan Fraenkel, chercheur de tendances à l’Ecole Hôtelière de Lausanne. On communique au client qu’on respecte les cycles de la vie au niveau de l’alimentation, du sommeil, etc.»

Au sein de cette dynamique très vaste, chacun trouve son propre créneau. Soins ayurvédiques de la ligne de l’ancien mannequin Christy Turlington au Spatio. Nourriture bio et végétarienne à la Réserve. Murs de végétaux dans les locaux du 12a à Genève. Pluies de fleurs et chlore limité au minimum dans la piscine du spa Cinq Mondes au Beau Rivage de Lausanne.

Les établissements wellness ressemblent toujours plus à des vergers, la luxuriance en moins — la sobriété serait en effet un prérequis à la détente. «Il y a une vraie demande de la part de nos clients. Nos membres sont soucieux de leur physique et de leur santé. Ils se rendent compte que tout passe par l’intérieur», explique Sandrine Davière, la nouvelle directrice du spa Une Autre Histoire de La Réserve.

Pour les soins par contre, l’établissement fait plutôt confiance aux marques prestigieuses de la cosmétique qu’aux produits bio. Question de positionnement sur le segment luxe. Au Cinq Mondes, spa qui vend ses propres produits, on vise le 100% naturel. «Leur créateur, Jean-Louis Poiroux, est issu de L’Oréal. Il a connu le monde du tout chimique et il en est revenu. Ses produits respectent une charte très précise. Ils sont sans silicone, sans huile minérale, donc sans pétrole — chose rare dans la cosmétique –, sans colorant et sans matière animale», explique Stéphane Reumont, manager du spa lausannois.

Dans le commerce, les produits de beauté carrément bio font des ravages. En 2006, le cabinet de conseil BBE évaluait à 1,3 milliard de francs le chiffre d’affaire des cosmétiques de ce type et prévoyait une croissance d’environ 18% par an.

Leader du marché, le Suisse Weleda voyait à la même époque ses ventes culminer à près 260 millions, soit une croissance de 30% sur cinq ans. Même le géant L’Oréal a investi dans le secteur en rachetant Body Shop il y a deux ans et la Migros commercialise les produits aux plantes Kneipp.

Suivant la tendance, les marques leader de la cosmétique communiquent aujourd’hui plus volontiers sur les vertus «redensifiantes» d’acides de fruits et les effets antioxydants du raisin, de la tomate ou de l’edelweiss qui peuplent leurs produits que sur leurs nouvelles découvertes chimiques. Ou alors elles découvrent les effets liftants de plantes rares comme la marula, la pueraria lobata, la tepescohuite. Des noms plus poétiques que ceux des molécules synthétiques. Et surtout potentiellement moins dangereux pour la santé.

Depuis les années 90, les associations de consommateur ont tiré l’alarme quant au risque pour l’organisme de certaines substances présentes dans les cosmétiques. Le parabène qui entre dans la composition de déodorants pourrait ainsi favoriser le cancer du sein. Toujours plus attentif à sa santé et à son bien-être, l’homme contemporain chercherait donc dans les produits bio ou naturels un moyen d’allier les deux.

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Trois adresses pour se faire du bien avec des produits bio

After the Rain
Passage des Lions 4
1204 Genève

After the Rain propose une carte de soins «gourmands» à base de lavande, de sésame, de miel ou de fleurs séchées des Alpes. Que des produits bio et suisses. Enveloppements dès 140 francs.

CBE Window Club
Lausanne Palace & Spa
Grand-Chêne 7-9
1002 Lausanne

On mange des produits bio et sans gluten au bar nutrition du Window Club. Fonctionne sur un système de carte de membre. Prix sur demande.

Centre Médical Mirador
1801 Mont-Pèlerin

Le Centre Mirador propose une cure biomoléculaire unique au monde qui contre les effets d’un mode de vie sédentaire. Dès 4’900 francs pour quatre jours de cure.

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Une version de cet article est parue dans L’Hebdo du 30 avril 2008.