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Sarkozy, un festival de modestie

Tendu, hésitant, confus, le président français a une fois de plus cherché à faire passer ses recettes. Forçant sur l’autocritique, il n’a pu détendre le masque qui figeait ses interlocuteurs.

Quel festival de modestie! Fidèle à sa manière, le président Sarkozy a surjoué jeudi soir son autocritique pour tenter de contrer l’impopularité extraordinaire (la plus forte de la Ve République) qu’il rencontre chez ses concitoyens.

Comprenant, dit-il, la déception des Français, il s’est essayé à faire croire que cette déception avait été prévue, les réformes entreprises par son administration ne pouvant que susciter grognements et mauvaise humeur.

L’heure est donc au profil bas. Très loin en principe des rodomontades de l’automne dernier. Avec, si nécessaire, la mise en cause de responsabilités venues d’ailleurs. La hausse des prix, c’est à cause de l’euro: «C’est un mensonge de le nier.» Les difficultés économiques, c’est la faute aux 35 h, etc.

Le paradoxe de cette conférence de presse qui se voulait rassurante est que la multiplication des «on a fait une erreur» ou des «j’assume, je me suis trompé» est loin d’être rassurante.

Comment faire confiance à un politicien qui accumule tant de fautes en une année. Qui recule dès qu’une réforme touche aux privilèges: chauffeurs de taxis, familles nombreuses à la SNCF, nababs africains…

De surcroît, il donna à diverses reprises l’impression de ne pas maîtriser ses dossiers (la difficulté technique pour le souffleur d’ajuster les prompteurs, peut-être) ou, carrément, de se planter. Comme à propos de l’affaire des sans-papiers qui ces jours-ci réclament leur régularisation, où il commence à énumérer les conditions nécessaires à la naturalisation française alors qu’il s’agit juste d’attribuer des permis de travail.

Ou, plus fort, quand (nous renvoyant aux «événements» d’Algérie) il affirme qu’il n’y a pas de guerre en Afghanistan, où il envoie pourtant des troupes en renfort! Ou, comble du ridicule, quand il affirme qu’il ne discutera pas avec Téhéran ou le Hamas parce qu’ils veulent la destruction d’Israël, après avoir reçu Kadhafi, qui pense la même chose, comme un roi.

Plus inquiétant. S’agissant de retrouver une popularité perdue, il n’a pas hésité à flatter le bon peuple dans le sens du poil en dénonçant les spéculateurs, en affirmant que «notre capitalisme marche sur la tête», en demandant que le G8 mette des bornes au capitalisme financier. Qui le croira?

Manifestement, face à la tâche, Sarkozy ne fait pas le poids. Est-ce sa faute? En partie seulement. Il est un habile politicien, mais contrairement à ce qu’il affirme, il ne sait pas du tout où il va. C’est d’ailleurs une incertitude qu’il partage avec ses confrères néo-conservateurs, les Bush, les Berlusconi dont le sel souci est de durer quitte à laisser un champ de ruines derrière eux.

Ces gens-là n’existent qu’en fonction des sondages et pratiquent une démocratie télévisuelle plus que citoyenne qui les pousse à boucher les trous au fur et à mesure qu’ils se creusent, sans objectif déterminé. Pour cacher son impuissance, Bush s’en est (mal) tiré en déviant l’attention par les guerres extérieures en Afghanistan et en Irak, en portant au paroxysme l’alerte antiterroriste.

Le coup est classique. En son temps, Mussolini avait fait de même en déclenchant la guerre d’Ethiopie. Aujourd’hui, à la veille de retourner au pouvoir, Berlusconi qui annonce déjà que les temps sont durs et les sacrifices inévitables, doit se triturer les méninges pour trouver son Ethiopie. Mais l’Italie et la France n’ont plus les moyens de se payer ces diversions. D’où le malaise auquel on répond par des virevoltes, des cabrioles, des jeux de jambes. Du vent.