La force internationale devait étendre l’autorité du pouvoir central et faciliter la reconstruction du pays. Cinq ans plus tard, elle se terre dans ses retranchements et se demande ce qu’elle fait dans cette galère.
Ce n’est pas parce que les grands médias internationaux couvrent moins l’Afghanistan que l’Irak que la situation y est plus réjouissante pour les Occidentaux. Et pour les autochtones.
Les bons souvenirs de la guerre éclair de l’automne 2001, quand les talibans furent balayés en quelques semaines par l’invincible armada de la coalition vite montée par les Américains, sont oubliés depuis longtemps. Il s’agissait de venger l’honneur perdu le 11 septembre. Cela fut fait dans les règles.
A tel point que, quelques mois plus tard, Washington, obnubilé par son désir d’envahir l’Irak, croyait pouvoir dire que du côté de Kaboul, la situation était sous contrôle. Et organiser l’entrée en jeu de l’OTAN en août 2003, sous la forme Force internationale d’assistance à la sécurité (ISAF), à laquelle contribuaient 37 pays; elle s’emploie théoriquement à étendre l’autorité du pouvoir central et à faciliter la reconstruction du pays. Pratiquement, elle se terre dans ses retranchements et se demande ce qu’elle fait dans cette galère.
Cette coalition, dont l’existence a été sanctionnée par l’Organisation des Nations unies, compte aujourd’hui plus de 50’000 hommes : environ 20’000 Américains sous commandement US et 33’000 soldats d’horizons divers sous commandement US aussi. Cette confusion des casquettes a d’ailleurs été dénoncée début mai par Massimo D’Alema, le chef de la diplomatie italienne, qui n’a pas envie que la brutalité américaine rejaillisse sur ses troupes.
Les talibans avaient annoncé en février qu’ils s’apprêtaient à déclencher une offensive. Ils n’y sont pas vraiment parvenu, faute d’armements probablement, se contentant de harceler les coalisés dans les zones sud du pays. Mais ils maintiennent une pression de tous les jours.
Le 19 mai, trois soldats allemands sont tués, le 23, un Finlandais meurt, 4 Norvégiens sont blessés, le 24 dix policiers sont tués, le 25 un soldat canadien, le 26 un Anglais plus 4 blessés, le 30 mai 5 soldats US, un Canadien et un Anglais sont tués dans leur hélicoptère. Le jeudi 31, ce sont 16 policiers qui sont fauchés par les talibans.
Une telle pression est évidemment dissuasive. De surcroît, en raison du peu de résultats obtenus par la gestion de Hamid Karzaï qui ne contrôle même pas le perron de son palais présidentiel, la détermination des coalisés occidentaux s’est fragilisée.
Il faut aussi rappeler, même si cela ne plaît pas, qu’en 2000, lors de leur dernière année de gouvernement, les talibans avaient réduit à pratiquement zéro la culture du pavot et la production de drogue. Aujourd’hui, l’Afghanistan a repris sa place de premier producteur mondial avec une production record de plus de 6000 tonnes!
Normalement, les Etats-Unis auraient dû décider la semaine dernière de la date du retrait des coalisés d’Irak et d’Afghanistan. On sait que G. W. Bush est parvenu à éviter la fixation d’une telle date tout en obtenant les 100 milliards de dollars supplémentaires nécessaires à la poursuite de ses guerres.
Le retrait n’est donc officiellement pas pour demain, mais pour après-demain peut-être, suite au départ de Bush.
Il n’en reste pas moins que les Européens — ils vont le répéter lors du prochain sommet du G8 — ne pourront pas prolonger encore longtemps leur escapade en Asie centrale. Les Britanniques l’ont déjà dit tout haut, Allemands, Français et Italiens pourraient les suivre sous peu.
Il s’agit pour eux de s’éclipser avant que le désastre soit total.
