LATITUDES

Le palais des Suisses s’affine: la preuve par l’huître

La consommation du mollusque bivalve connaît une hausse réjouissante. Le mérite en revient notamment à la stratégie des ostréiculteurs: on s’efforce désormais de valoriser la spécificité des différents «crus».

Les mers recèlent une centaine d’espèces huîtres, qu’on peut regrouper en trois types principaux: les creuses, les plates et les perlières. (Pour en savoir plus sur ces dernières, on renverra le lecteur aux aventures d’Henri de Monfreid).

Pour en revenir aux deux autres, on soulignera que les creuses que nous connaissons aujourd’hui (Crassostrea gigas), sont originaires du Pacifique, du Canada comme du Japon; alors que le Morbihan est le berceau des huîtres plates (Ostrea edulis).

Les premières, acclimatées pour remplacer la portugaise (gryphée) représentent désormais l’essentiel de la production, alors que les plates demeurent marginales.

En Suisse, les importations d’huîtres (presque exclusivement françaises) ne cessent d’augmenter depuis une vingtaine d’années.

Les Helvètes ont enfin succombé au charme de Crassostrea gigas et de sa cousine. Une des explications tient à l’effort d’information consenti par les producteurs, relayé par la restauration et la distribution.

Les producteurs jouent de plus en plus la carte du terroir: on s’est mis à parler de crus pour les huîtres, au même titre que pour les vins.

Cette stratégie repose-t-elle sur quelque vérité ou s’agit-il juste d’un bon coup de marketing? Il y a bien une typicité des terroirs, confirment les spécialistes, liée à la variété d’origine de l’huître, mais surtout à son environnement (salinité de l’eau, qualité du plancton) et à son élevage.

Autrement dit, une Oléron n’a rien à voir avec une Isigny. Et ces délices iodées correspondent bel et bien à six crus principaux, délimités par leurs zones de production: Normandie, Bretagne (Nord ou Sud), Vendée, Marennes-Oléron (de La Rochelle à l’embouchure de la Gironde), Arcachon et Méditerranée (Bassin de Thau).

A cela s’ajoutent les spécificités liées à l’affinage: les Marennes-Oléron (plus de la moitié des huîtres françaises, soit 50 à 60’000 tonnes par an) séjournent plus ou moins longuement dans des claires, ces anciens marais salants. Une eau riche en sels minéraux et en plancton, d’où cette saveur spéciale, évoquant la noisette. Autre particularité, la présence d’une algue microscopique, la navicule bleue, à l’origine de la teinte verte caractéristique des fines de claires.

Autant de détails qui ajoutent aux particularités de chaque cru d’huîtres.

Reste toutefois, au moment d’y goûter, l’éternel débat: citron ou échalote?