Le long du Léman, les mobiles basculent souvent sur les réseaux étrangers. Et les communications qui passent par la France sont trois fois plus chères…
Entre Lausanne et Genève, les usagers de portables constatent souvent que leur appareil bascule sur un réseau français. Au lieu de celui de leur opérateur, c’est SFR, Bouygues ou Orange France qui apparaît sur l’écran, ce qui augmente le montant de la facture. Le problème est bien connu des frontaliers.
La tarification d’itinérance (roaming) est élevée: à titre d’exemple, chez Swisscom, un appel vers la Suisse depuis un réseau français coûte 1,60 franc la minute, soit trois fois plus que depuis le réseau Natel. Et la réception en territoire étranger devient, elle aussi, payante (60 centimes la minute).
Pour éviter ce coûteux désagrément, les abonnés qui fréquentent souvent les zones frontalières désactivent l’itinérance automatique de leur téléphone. «Sélectionner manuellement l’opérateur suisse est le seul conseil que nous pouvons donner», regrette Christian Neuhaus, porte-parole de Swisscom.
Mais, au fait, pourquoi les réseaux français sont-ils si souvent atteignables chez nous? Il y a plusieurs raisons. La première, c’est que le lac ne représente pas un obstacle pour les ondes hertziennes. «Les ingénieurs nous disent pourtant que les émetteurs de téléphones mobiles sont directionnels, c’est-à-dire qu’ils envoient un signal dans un secteur précis», note encore Christian Neuhaus. Techniquement, ils pourraient donc éviter la Suisse.
L’autre raison évoquée, c’est la puissance de l’émission. Les lois suisse sont parmi les plus strictes du monde concernant ce qu’on appelle l’électrosmog. La réglementation empêche les opérateurs d’installer des antennes trop puissantes, en particuliers dans les zones habitées comme sur les rives du Léman.
En France, le seuil est dix fois plus élevé, et les opérateurs ne se gênent pas d’installer des émetteurs très puissants, en particuliers sur les sommets qui sont, de l’autre côté du lac, peu habité.
Mais peut-être faut-il aussi chercher une raison économique. En couvrant plus ou moins volontairement la Suisse, les opérateurs français dégagent des sources de revenus indirectes intéressantes. Car, chaque fois qu’un Suisse utilise leur réseau, une bonne partie de la facture atterrit dans leur poche.
«On ne peut pas prouver qu’ils dirigent stratégiquement leurs antennes vers le Léman, dit Christian Neuhaus. Et de toute manière, nos autorités de régulation comme l’OFCOM, ne peuvent pas appliquer leurs règles en France.» Dans l’autre sens, l’opérateur national affirme ne diriger aucune antenne au-delà de la frontière helvétique. Ce serait de bonne guerre! Mais doit-on croire en sa bonne foi?
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Une version de cet article de Largeur.com a été publiée le 23 mars 2003 dans l’hebdomadaire Dimanche.ch.
