Plus que jamais, les antennes de Largeur.com restent braquées sur les conversations. Le jargon technophile, les expressions des banlieues ou des clubs branchés sont soigneusement épinglés et décryptés chaque week-end dans notre page Futur de l’hebdomadaire Dimanche.ch. Ces néologismes peuvent être ridicules, anglo-centristes, ultraprécis ou triviaux. Ils dévoilent des réalités et des comportements insoupçonnés.
Rétrospective des principaux mots clés captés en l’an 2002.
Altermondialiste. Les militants ne veulent plus être appelés «antimondialistes». Ceux du mouvement Attac, par exemple, précisent qu’ils ne sont pas contre la mondialisation, mais pour une autre mondialisation. Ils préfèrent donc le terme «altermondialiste».
Bourrin. Les tribus branchées ont recyclé ce synonyme populaire de «cheval» pour lui donner un nouveau sens: celui d’«homme peu raffiné». Exemple: «elle couche avec un bourrin». Les linuxiens (voir ce mot) utilisent également le mot «bourrin» pour qualifier un système informatique particulièrement lent et lourd.
Carotter. Expression des banlieues signifiant «voler, extorquer». Exemple: «Y m’a carotté un zedou de teuchi, l’bâtard, j’’vais lui niquer sa race.» Traduction: «Le scélérat m’a dérobé douze grammes de cannabis, il va s’en mordre les doigts».
Craiefiti. C’est un symbole tracé à la craie sur un mur pour indiquer la présence d’un réseau sans-fil. En Californie, le craiefiti («warchalking») est devenu l’activité préférée des wifistes (voir ce mot).
Geek hop. Des jeunes blancs becs américains (Sage Francis, Cex, MC Paul Barman) s’emparent du hip hop pour lui redonner une conscience politique. Leur musique est qualifiée de geek hop (terme légérement péjoratif).
Intrapreneurship. C’est un comportement d’entrepreneur autonome (entrepreneurship) à l’intérieur même d’une grande organisation. Terme très en vogue dans les séminaires d’entreprise.
Kawaii. Cet adjectif («mignon» en japonais) est abondamment utilisé dans les cercles de l’art contemporain. Il désigne les personnages de manga ou jeu vidéo automatiquement attendrissants. Si votre petite nièce a des yeux immenses et de jolies fossettes, vous pouvez dire qu’elle est «kawaii».
Linuxien. Informaticien adepte des logiciels libres et de Linux. Ce système d’exploitation, inventé par un hacker de 22 ans, s’impose comme un concurrent sérieux du Windows de Microsoft.
Mullet. C’est la terrible coupe de cheveux «long sur la nuque», genre Lou Reed ou Gabet Chapuisat. Elle revient en force, et pas seulement chez les bourrins (voir ce mot).
Noughties. Après les les seventies, les eighties et les nineties, on ne savait pas comment appeler la décennie actuelle. Les anglophones commencent à utiliser le terme «noughties» (de «nought», zéro). Même le Financial Times s’y est mis.
Social engineering. C’est le piratage informatique des comportements. Les «social engineers» étudient les techniques psychologiques pour vous faire cliquer sur une pièce-jointe afin de contaminer votre machine.
Spin. On le sait, les «spin doctors» sont des spécialistes de la communication au service des partis politiques. Leur rôle: obtenir un traitement médiatique favorable. Du coup, le mot «spin» (littéralement: faire tourner) est de plus en plus utilisé pour désigner la «gestion de la perception».
Spoiling. C’est le fait de raconter la fin d’un film à quelqu’un qui ne l’a pas encore vu («gâcher»). «Difficile de dire pourquoi on a aimé «Sixième Sens» sans faire du spoiling.»
Ripper. Verbe transitif, issu de l’anglais «to rip» (déchirer, mettre en pièces). Consiste à extraire le fichier vidéo (en format MPEG) d’un disque DVD, par exemple pour le compresser et le réexploiter sur d’autres supports. Exemple: «J’ai rippé «Gattaca», me reste plus qu’à l’encoder en DIVX avant de le balancer online» (un adepte des échanges de films sur internet).
TNT. Ces initiales ne désignent plus seulement l’explosif trinitrotoluène. En France, l’acronyme TNT abrège désormais aussi l’expression «télévision numérique terrestre», une technologie qui permettra dès 2003 de diffuser une vingtaine de nouveaux programmes en qualité d’image et de son proche du DVD.
Wifiste. On appelle ainsi les adeptes des réseaux locaux sans fil (wireless fidelity ou wifi) qui permettent de surfer à haut débit en plein air avec un ordinateur portable.
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Une version de cet article de Largeur.com a été publiée le 29 décembre 2002 dans l’hebdomadaire Dimanche.ch.