Dans une conjoncture globalement morose, la publicité sur le net devrait connaître une forte croissance en 2003. Une augmentation de 106% est prévue.
Pour une fois, ce ne sont pas des publicitaires aux lunettes roses qui affichent les prévisions les plus optimistes, mais un austère institut bâlois. Dans un rapport publié au début de l’automne, le bureau de prospective commerciale Prognos annonce un bond de 106% du marché suisse de la pub en ligne pour 2003.
Son enthousiasme a surpris les professionnels. «Dans une conjoncture globalement à la baisse, j’ai de la peine à imaginer une croissance de la pub sur le net, lâche Silvana Tomasino, spécialiste du webmarketing. Les retombées sont encore trop faibles par rapport à l’investissement en temps que cela demande.»
«Les projections de Prognos nous paraissent effectivement très optimistes», enchaîne Marcel Bosshard, directeur de Publimedia webadvertising et Publicitas webservices, numéro un suisse du secteur avec une part de marché d’environ 40%. «Compte tenu de la situation économique actuelle et des menaces de guerre en Irak, il est très difficile d’avancer des prévisions précises. Mais nous estimons que c’est sur l’internet que les investissements publicitaires devraient connaître le plus fort taux de croissance, l’année prochaine.»
Il est vrai que le marché global de la pub ne s’annonce pas brillant. Interrogé samedi dernier par Le Temps, le directeur du géant suisse Publigroupe, Hans-Peter Rohner, prévoyait un recul de 3 à 5% des investissements publicitaires, tous supports confondus, pour l’année à venir. Les chercheurs de Prognos n’ont-ils pas l’impression d’avoir été excessivement optimistes? «Pas du tout, répond Josef Trappel, chef des recherches médias de l’institut bâlois. Nous maintenons tous nos chiffres. Ils sont basés sur des enquêtes macroéconomiques, que nous avons vérifiées par des entretiens avec de nombreux acteurs du marché.»
Et comment l’institut peut-il prévoir ce bond de 106%? «Plusieurs phénomènes vont doper la pub en ligne. Il y a d’abord la diversité des formats. Les nouveaux supports, plus grands que les banners, encouragent les annonceurs à tenter des expériences sur le net, ce qu’ils vont continuer à faire l’année prochaine. Par ailleurs, le réseau leur permet de toucher un public-cible particulier, celui des jeunes, qui sont difficilement accessibles avec la presse traditionnelle. Enfin, la pub en ligne touche les gens pendant la journée. Il y a là un avantage par rapport à la TV, qui est regardée surtout le soir. C’est pour toutes ces raisons que les annonceurs vont fortement augmenter leurs investissements en ligne.»
Au-delà des spécificités du média internet, la progression prévue par Prognos s’explique surtout par les faibles volumes pris en considération. Le marché suisse de la pub sur l’internet ne devrait pas dépasser les 14 millions de francs, cette année. Il atteindra donc, si les prévisions de Prognos se confirment, 29 millions en 2003 – ce qui reste loin des 35 millions réalisés en 2000, et toujours marginal par rapport au marché publicitaire global.
Les portails et les sites de presse, qui tirent encore l’essentiel de leurs revenus de la publicité, observent de près ces variations. «Nous avons de bonnes réservations d’espaces pour 2003, déclare Stefan Renninger, de Romandie.com, premier portail romand. Le marché s’est normalisé. Les professionnels de la pub ont maintenant l’habitude d’intégrer l’internet dans le mix-média, ce qui nous rend optimistes.»
Nouveaux sites en Suisse romande
Hasard du calendrier, les deux quotidiens romands transcantonaux préparent de nouvelles versions de leur site. Outre un habillage graphique rafraîchi, LeTemps.ch proposera de nouveaux services et un système de facturation inédit. «Désormais, seule une partie de l’édition quotidienne sera accessible gratuitement en ligne, explique Gaël Hurlimann, responsable de la rubrique internet du journal. Pour accéder à l’intégralité du contenu quotidien, en version PDF ou sur leur navigateur, les internautes devront souscrire un abonnement mensuel d’une dizaine de francs, qui leur permettra également de recevoir des newsletters spécialisées.»
Quant à l’accès aux archives du journal, il restera payant selon un système de facturation séparé. En commercialisant son contenu en ligne, LeTemps.ch espère dépendre un peu moins, l’an prochain, de la publicité.
Des nouveautés sont aussi prévues sur LeMatin.ch. Christophe Rasch, en charge du projet, confirme qu’une nouvelle version du site est en chantier, mais préfère ne pas la dévoiler pour l’instant.
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Une version de cet article de Largeur.com a été publiée le 24 novembre 2002 dans l’hebdomadaire Dimanche.ch.
