Il est des noms de famille difficiles à porter. Depuis Abitmol jusqu’à Zizi, en passant par Baisecourt, Branlard, Gicleux, Le Gland et Sèchepine, la liste des «patronymes obscènes» est bien longue. Un site français les répertorie d’ailleurs consciencieusement.
Facile d’en rire lorsqu’on ne se sent pas concerné. Mais qui vous garantit qu’un jour votre nom ne suscitera pas l’hilarité? Les membres de la famille Cialis sont en train d’en faire l’expérience.
La multinationale pharmaceutique Eli Lilly s’apprête à lancer sur le marché un produit concurrent du Viagra contre les troubles érectiles. Son appellation? Cialis précisément.
En apprenant la nouvelle, Albert Cialis, domicilié en Grande-Bretagne, et onze membres de sa famille ont alerté les responsables du groupe Eli Lilly. Sans signe de leur part, ils ont décidé d’alerter la presse, en commençant par le prestigieux British Medical Journal. «Nous sommes horrifiés par cette situation et avons demandé à Eli Lilly de modifier le nom de son produit, déclare la famille Cialis. Les représentantes féminines de notre famille risquent d’en faire les frais, et on se moquera de nos jeunes enfants qui subiront des dommages psychologiques.»
La demande que le Cialis soit rebaptisé met Eli Lilly dans l’embarras à l’heure où la compagnie vient d’obtenir le feu vert de la Food and Drug Administration (FDA) pour lancer une campagne publicitaire à l’échelon mondial. On l’aura compris, des millions sont en jeu.
Vers quelle solution s’achemine-t-on? Gilles Arnoux, le porte-parole d’Eli Lilly pour la Suisse, répond par un «no comment». Il se livre en revanche volontiers à une analyse de l’évolution du marché des produits érectiles. «Avec l’arrivée prochaine de notre produit et d’un autre de Bayer, le laboratoire Pfizer (n.d.l.r.: fabricant du Viagra) va perdre sa situation de monopole et nous allons entrer dans un marché plus compétitif. Chaque produit aura sa manière de se profiler.»
Et quel sera le positionnement de Cialis? «Nous allons offrir une fenêtre d’utilisation plus longue, explique Gilles Arnoux. Notre produit est en effet efficace durant au moins vingt-quatre heures. Cela correspond aux vœux des patients qui souhaitent une spontanéité plus grande que ce qui leur est offert actuellement par le Viagra.» Quelle que soit son appellation, le nouveau médicament d’Ely Lilly devrait débarquer dans le courant de l’année 2003 en Suisse. Il ne sera pas seul.
L’arsenal thérapeutique du parfait amant est effectivement en plein essor. Les laboratoires de recherche développent diverses molécules du plaisir qui ont pour noms sildénafil, alprostadil, apomorphine, tadalafil et vardénafil. Ces molécules sont commercialisées sous le label Muse et Uprima (chez Abbott), Caverject (Pharmacia), Ixense (Takeda) et probablement Nuviva (Bayer).
Muse
Acronyme de Médicament Urétral pour la Stimulation de l’Erection, c’est un gel de prostaglandine sous forme de micro-suppositoire que l’on insère dans l’urètre. Le médicament agit sur les parois des artères. L’érection est censée survenir en 5 à 20 minutes et dure 40 à 70 minutes.
Caverject
Ce produit est injecté dans le corps caverneux, au cabinet médical. Une fois le dosage ajusté, le patient peut être initié à la technique d’auto-injection. Il s’agit de la méthode la plus invasive, non dénuée de possibles effets secondaires, mais probablement la plus efficace.
Uprima et Ixense
Tous les deux ont une action totalement différente du Viagra. Ces médicaments éveillent une érection en activant les cellules du cerveau impliquées dans le processus d’érection. La courte expérience accumulée par les spécialistes semble montrer un effet moins spectaculaire qu’avec le Viagra.
Cialis et Nuniva
Ce sont des cousins du Viagra. Comme ce dernier, ils bloquent une enzyme appelée phosphodiesterase-5, ce qui provoque le relâchement musculaire et l’augmentation du volume sanguin dans le pénis. Leur entrée en action serait plus rapide, leur durée plus longue et les ef-fets secondaires moins fréquents.
Acheter ces produits sur le net?
Depuis le Caverjet jusqu’au Viagra, la plupart des produits érectiles sont en vente directe sur des sites basés aux Etats-Unis. Les internautes européens peuvent donc les acheter en ligne et se les faire livrer chez eux. Cette pratique est cependant fortement déconseillée par les professionnels de la santé.
L’automédication augmente le risque d’effets secondaires majeurs, qu’une évaluation médicale préalable permettrait le plus souvent d’éviter. Ces risques sont d’ordre très divers: arrêt cardiaque, priapisme, thromboses du corps caverneux, céphalées, etc. Un conseil, donc: consultez d’abord votre endocrinologue.
En Suisse, l’injection de 20ug de Caverject coûte 42 fr. 35
Le suppositoire de 1000ug de Muse, 46 fr. 40
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Une version de cet article de Largeur.com a été publiée le 30 septembre 2002 dans l’hebdomadaire Dimanche.ch.
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